Un débat a lieu en ce moment sur le forum, à propos de l’appellation de cinq-huitième. Il s’agit en fait d’une appellation typiquement NZ. Je ne pense pas qu'on l'utilise beaucoup ailleurs. J’avais commencé à rédiger un message pour tenter d’expliquer ce que c’est, quand j’ai trouvé ce bon article de Spiro Zavos dans mes archives, tiré du magazine The Roar et datant de 2010. Aussi décidé-je de le traduire, en y ajoutant des notes, entre crochets, surtout pour expliquer maladroitement les termes anglais
Voici l'article en question :
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Il y a eu une discussion érudite et fascinante sur The Roar à propos de mon utilisation des mots "premiers cinq-huitièmes" pour décrire la position sur le terrain de rugby du joueur se tenant juste à l'extérieur de la charnière [half-back en anglais, qui se compose d’un fly-half (10) et d’un scrum-half (9)].
Cette discussion m'a encouragé à écrire cet article, afin d’exposer mes réflexions sur ce que devraient être les noms des postes sur le terrain de rugby.
Mais d'abord, la question des premiers cinq-huitièmes.
Plusieurs lecteurs ont suggéré que si le terme doit être utilisé, il devrait l’être au singulier - cinq huitième. Un autre point qui a été soulevé est que le terme est un usage néo-zélandais et n'est pas vraiment applicable au reste du monde du rugby.
Dans des cas comme celui-ci, je consulte invariablement ma bible : « The Encyclopedia of World Rugby » de Keith Quinn (ABC Books, 1993) [très bon livre, je recommande]
Quinn est un vétéran et un commentateur et auteur de rugby néo-zélandais parmi les plus accomplis. Il est toujours extrêmement précis, comme vous pouvez l'entendre lors de ses commentaires sur l'IRB Sevens, où il est précis dans la prononciation des noms de tous les joueurs [le Marc Lièvremont local].
La section de son Encyclopédie qui est pertinente est intitulée : CINQ-HUITIÈMES.
Donc mon orthographe est correcte.
Quinn note que ce terme est utilisé presque exclusivement en Nouvelle-Zélande. Il est né avec le capitaine des All Blacks de 1903, Jimmy Duncan. Dans d'autres pays, les termes sont 'stand-off' 'fly-half' ou 'outside half'.
Ce qui est important ici est que la plupart des termes de position se rapportent directement à une certaine théorie du rugby.
Pour ce qui est du terme de cinq-huitièmes, Quinn dit que dans les années 1900, le joueur le plus loin derrière les avants était l’arrière [en anglais « full-back »]. Ceux situés à mi-chemin étaient des « demi-arrières » [« half-back » en anglais, soit la charnière]. Les joueurs entre les demi-arrières et l'arrière étaient les « trois quarts ».
Duncan, selon Quinn, a pris un joueur des avants et l'a placé non loin du demi-arrière. Ce joueur pouvait ramener le ballon aux avants ou le passer aux trois-quarts.
Comme le joueur et les joueurs suivants (dans le système des deux « cinq-huitièmes ») se tenaient entre la moitié et les trois quarts, il était mathématiquement logique, suggère Quinn, d'appeler la position « cinq huitièmes ».
En Australie, une théorie différente de la liaison des arrières et des avants a prévalu.
J'appelle la théorie, les 3 Fives : les cinq de devant (première et seconde lignes), les cinq de liaison (les trois membres de la troisième ligne [en anglais « loose forward, ce que je traduirais par « avants libres », en opposition aux « tight five » précédents] et les deux demis) et les cinq offensifs (centres, ailier et arrière).
Ces théories ont eu un impact sur la façon dont les différentes positions ont été jouées.
En Nouvelle-Zélande, par exemple, le running halfback [« demi coureur » – halfback signifie « membre de la charnière » ou encore « demi », qu’il soit « demi de mêlée » ou « d’ouverture »] du style Ken Catchpole, John Hipwell, Nick Farr-Jones et Will Genia, est mal vu. Sid Going est à peu près le seul grand « running halfback » néo-zélandais.
Le demi néo-zélandais par excellence, comme Chris Laidlaw ou Dave Loveridge, est avant tout un passeur.
La théorie en NZ est que les deux cinq huitièmes mettent en place le jeu pour les outside backs [ou « arrière extérieurs », soit les 11, 13, 14 et 15, i.e. toute la ligne d’arrière à l’exception du 12, qui est justement un 5/8 – vous suivez toujours ?].
En Australie, au Pays de Galles et en Afrique du Sud, ce sont les deux demis qui mettent en place le jeu pour les arrières extérieurs.
L'Australie et l'Afrique du Sud ont tendance à utiliser un système de centre intérieur et extérieur. Il y a peu de différence dans la façon dont les deux postes sont jouées. Les deux postes consistent à courir et plaquer, plutôt que de passer comme dans le cas d’un poste comme le second 5/8.
Ainsi, le plus grand centre intérieur d'Australie, Tim Horan (qui était un piètre passeur, ce que le système néo-zélandais n’aurait pas toléré) jouait à peu près de la même manière directe que le plus grand centre extérieur d'Australie, Trevor Allan.
Le système de centre gallois/britannique compliquait davantage encore les choses, mais il est maintenant moins fréquemment utilisé – il consistait à associer un centre particulier à une aile particulière, dans une sorte de système centre gauche et centre droit.
Pour ce qui est des avants, nous trouvons des différences similaires entre les différents pays.
Quinn, dans sa section sur les FLANKERS, parle du système néo-zélandais consistant en un "blindside flanker" [#6] qui se place toujours du petit côté et permet de gagner la balle [gagner des turnovers] et de tacler, et du "openside flanker" [7], généralement un joueur plus petit et plus rapide qui joue le rôle de « récupérateur », comme les Sud-Africains appellent la position, attaquant les demis adverses et récupérant tous les ballons libres disponibles.
La base théorique de ce système m'a été décrite par Vince Paino, un ancien entraîneur de Wellington, il y a quelques décennies : « Le rythme des arrières est le rythme du plus lent des arrières. Le rythme des avant est le rythme de l'avant le plus rapide. »
Il y a cependant une autre complication dans tout cela.
L'Australie (avant George Smith et Phil Waugh) et l'Afrique du Sud, encore aujourd'hui [l’article date de 2010], utilisent des flankers [troisième-lignes aile] gauche et droit, un peu comme les centres gauche et droit. Dans le passé, il était extrêmement rare dans le rugby sud-africain que les équipes aient de petits « récupérateurs » rapides.
Même aujourd'hui, malgré l'avènement de Heinrich Brussow (qui joue un rôle qui correspond typiquement à un 7 néo-zélandais), les Springboks alignent dans leurs matchs les énormes et abrasifs Shalk Burger ou Juan Smith (de grands joueurs, tous les deux) comme troisième-lignes aile "récupérateurs".
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Nous sommes maintenant en mesure, je pense, après ce bref exposé historique, d'essayer de répondre à la question qui anime cet article, et d'énoncer les noms qui, en 2010, semblent convenir aux différents postes d'une équipe de rugby.
L'IRB a en effet publié en 1993 un document fixant une nomenclature internationale : loose head prop, tight head prop, hooker: left lock, right lock: left flanker, right flanker: number 8: scrum half, fly half: left centre, right centre: right wing, left wing: fullback.
Certains de ces termes positionnels ont du sens. Mais certains d'entre eux reflètent une nomenclature britannique démodée (comme on pouvait s'y attendre de l'IRB en 1993) qui n'est même pas utilisée dans le rugby britannique de nos jours.
[...]
Il est aussi grand-temps de remplacer l’appellation de 5/8 néo-zélandaise, assez cryptique, et de la remplacer par les centres intérieur et extérieur, plus modernes.
Voici donc la nomenclature que je propose : loose head prop, tight head prop: hooker: locks: blindside flanker, openside flanker: number 8: halfback: number 10: inside centre, outside centre: left winger, right winger: fullback.