Ce verdict a soulagé l'homme aux dix titres de champion de France comme coach, un homme fier et orgueilleux qui ne pouvait supporter l'idée de la suspicion. Mais s'il a lavé son honneur, il ne l'a pas totalement apaisé. « J'ai pris tellement de coups », justifie-t-il. Trop, donc, pour replonger une dernière fois. « Et puis, soupire-t-il, je ne suis pas sûr d'avoir le temps qu'il faut pour bâtir et surtout réussir un projet. Car ce n'est qu'à la fin qu'on regarde si on a réussi. »
Au Stade Toulousain, cette fin souligne un triomphe total (lire ci-dessous). Il a consacré quarante années de sa vie, comme joueur puis entraîneur, au club des Sept-Deniers. Quarante années à chercher à être le meilleur, toujours, à avoir un temps d'avance, à se bâtir un palmarès incomparable. Des décennies marquées par cette confiance, cette liberté dont il a longtemps pu bénéficier. Avec les Bleus, la confiance avait cédé le pas à la défiance, et il n'a pas survécu au sein d'une institution au sein de laquelle il n'avait pas les mains aussi libres.
En début d'année dernière, il pensait pourtant rebondir, pourquoi pas. « Si je retrouve la totalité de mon honneur, confiait-il dans les colonnes du Midi Olympique, que quelqu'un de qualité me présente un projet de qualité, où je dispose de liberté et d'une confiance totales, je regarderai, j'écouterai. Et je répondrai oui ou non. »
L'Italie l'a approché. Brive et le Stade Français l'ont sondé. Il a poliment décliné. Il n'a plus envie. Plus la force. La passion, avec l'âge, avec les épreuves, s'est étiolée. « Mes préoccupations sont sans doute ailleurs, nous confiait-il hier en tout début d'après-midi. Elles tournent autour de ma famille, de la santé de mes proches, celle de mon épouse, de mes enfants et petits-enfants. Lorsque je regarde dans le rétroviseur aujourd'hui, je me rends bien compte combien les rapports que j'entretenais avec mes joueurs étaient forts. Au cours d'une carrière, on ne sait pas forcément les apprécier, ils sont éphémères, parce qu'on n'a pas, ou on ne prend pas le temps de s'appesantir. Mais la vie est ainsi faite qu'elle a besoin de ce genre de rapports. Et je suis fier d'avoir pu les entretenir. »
Guy Novès n'entraînera plus. Il avait cet art de sublimer ses hommes, cette capacité à redonner confiance aux joueurs. Ce talent pour tirer leur quintessence. Cet art, ce talent, n'ont pas survécu à son passage en bleu.
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Sa carrière en trois temps forts
1989 - 10 fois champion de France
Joueur du Stade Toulousain, il a soulevé deux boucliers (1985, 1986), mais c'est évidemment en qualité d'entraîneur, puis de manager qu'il a décroché ses lettres de noblesse. Entre 1989 (photo, 2e en partant de la gauche), époque où il avait été choisi afin d'assister le duo Skrela-Villepreux, et 2015, date de son départ du club, il a ainsi décroché dix Brennus. C'est Jean-René Bouscatel qui lui a confié la responsabilité de l'équipe à partir de 1993. Choix gagnant puisqu'il a remporté quatre titres d'affilée (1994 à 1997), mais surtout fait passer au club le cap du professionnalisme.
2010 - 4 fois champion d'Europe
Pionnier sur cette scène dont il a disputé le premier match, le 31 octobre 1995 face aux Roumains de Constanta, il a non seulement remporté la première édition à l'Arm Parks de Cardiff (1996), mais également décroché trois autres titres (2003, 2005, 2010, photo), ce qu'aucun autre entraîneur n'est parvenu à faire à ce jour. Également finaliste en 2004 et 2008, il est le seul technicien à avoir dépassé la barre des 100 succès en Coupe d'Europe. Au final, il a dirigé 151 rencontres lors de vingt campagnes et affiche un bilan de plus de 70 % de victoires.
2017 - 21 matches à la tête des Bleus
Sélectionné comme ailier à 7 reprises entre 1977 et 1979, approché une première fois en 2011, il est finalement nommé à la tête de l'équipe de France par le président de la FFR Pierre Camou le 31 mai 2015, avant d'en être écarté par Bernard Laporte, successeur de ce dernier, le 27 décembre 2017. Au total, le Toulousain aura dirigé 21 rencontres en qualité de sélectionneur pour un bilan de 7 victoires, 1 nul et 13 défaites. Un pourcentage de victoires trop faible (33 %) pour avoir le temps d'imposer son style et de nouer une forme de connivence avec ses joueurs