Ah, Messieurs (et Wallis et Lavande),
Me voilà bien triste. Mhônmhôn est décédée mardi 2 octobre et fut enterrée hier.Tout s'est bien passé. La maladie rétive a été assommée à coups de morphine et autres antalgiques si bien que Mhônmhôn ne s'est pas vue partir. La cérémonie funéraire fut organisée par mes soins et je me suis découvert un don tardif d'organisation, moi qui ne sais pas organiser la rencontre entre une poêle à frire et un oeuf.
Ma Mhônmhôn chérie fut inhumée après un service funéraire à Saint Germain de Charonne. Vous vous en foutez mais c'est l'église des Tontons Flingueurs scène finale et avec le père Pierre que j'avais fait venir de ma paroisse pour l'occasion on a fait "ting tigueding gueding ting ting" en rigolant pour évacuer la tension.
Je ne sais pas pourquoi je raconte ça ici. Nous étions une famille comme les autres, avec les trucs qui n'allaient pas, les divorces et tout et tout. Mais on n'a qu'une Mhônmhôn.
Née en 1936, famille de militaires. Son père est un orphelin de 1918, lui même officier. Sa mère est fille d'un officier gazé en 1917 qui mourra dans les râles en 1937.
Direction Toulon, où se repose la Coloniale entre deux séjours lointains, puis le Liban, où une révolte se fomente.
1940 : première séparation d'avec son père, qui part combattre les ritals du côté de Nice (victoire) puis part dans l'armée d'armistice en Afrique.
1944 retour du papa qui débarque à Cavalaire 9ème division d'infanterie coloniale, puis libère Toulon où sa fille crève de misère avec une mère un peu bizarre.
Ma Mhônmhôn monte dans une jeep, et je crois qu'elle est la seule enfant de troupe à avoir franchi le Rhin en février 45 avec la 1ère armée.
1946 : 2ème séparation d'avec son père qui part en Indo. Il est fait prisonnier à son deuxième séjour en 49, puis rentre en 54.
Les choses vont mal pour ma Mhônmhôn qui apprécie peu son beau-père.
Elle s'évade (elle est mineure) et devient hôtesse sur Air Algérie, pays où son père dirige une école d'officier. Là elle a le choix entre un intellectuel aux poignets fins et un lieutenant de paras hirsute et devinez qui elle choisit ? Mon père, le para.
Après elle passe sur Air France. Mais à l'époque une hôtesse n'a pas le droit de se marier. ET ma grande soeur arrive : mariage obligatoire, fin de l'indépendance.
Elle nous élève, moi et mes deux soeurs.
Comme elle aime tout le monde, elle passe son temps aux compagnons d'Emmaüs et au Secours Pop. Et puis comme elle aime recevoir elle fait une bouffe incroyable, elle qui est au régime en permanence.
Divorce dans les eighties. Et devinez qui est veuf ? L'intellectuel aux poignets fins. Mariage, bonheur.
ET puis cette maladie de merde.
Voilà, c'était ma Mhônmhôn et je suis bien triste.
Je raconte ça ici pour défouler la douleur, mais aussi parce que certains d'entre vous, au fil des années sont devenus des sortes d'amis virtuels. Merci de vos pensées et Lorenzetti enculé.