Il y a deux mois, le ministère des Sports, des Jeux olympiques et paralympiques dévoilait le plan de sobriété énergétique du sport. Le but étant de définir une trajectoire pour aider les clubs professionnels à réduire leur consommation énergétique dans les plus brefs délais et à se préparer en cas de tension sur le réseau et de signal rouge Écowatt.
Parmi les quarante propositions, une quinzaine les concernait. Ils en ont rapidement adopté certaines, comme la réduction de l'éclairage du stade les jours et soirs de match, la réduction de la luminothérapie ou du chauffage dans les bâtiments et des pelouses. En raison de la trêve imposée par la Coupe du monde, les clubs de Ligue 1 et Ligue 2 ont pu faire des économies, étant donné que les stades n'ont pas été utilisés depuis un mois. Cela n'a pas empêché certains de prendre de plein fouet la crise énergique et la hausse des tarifs de l'électricité.
Face à cette crise, les clubs ont adopté deux stratégies différentes. D'un côté, il y a ceux qui ont anticipé et ont signé des contrats avec des tarifs fixes. C'est notamment le cas du LOSC - « nos contrats en cours nous permettent de limiter les augmentations pour le moment » - et du Stade Rennais, où l'on se dit « serein », mais « vigilant avant le terme de notre contrat actuel ».
« Nous disposons aussi du bouclier tarifaire mis en place par l'État qui nous permet d'économiser 12 000 € sur une période de six mois. Il s'agit d'une taxe qui est passée de 22,50 €/MWh à 0,50 €/MWh depuis le 1er février 2022 »
Un porte-parole du RC Strasbourg-Alsace
Au RC Strasbourg-Alsace, où la consommation a sévèrement baissé, de l'ordre de 10 à 15 % par rapport à l'année dernière, la facture est même moins salée. « Nous disposons aussi du bouclier tarifaire mis en place par l'État qui nous permet d'économiser 12 000 € sur une période de six mois. Il s'agit d'une taxe, la TICFE (Taxe Inférieure sur la Consommation Finale d'Électricité) qui est passée de 22,50 €/MWh à 0,50 €/MWh depuis le 1er février 2022. » Une exception.
Le Montpellier Hérault Sport Club, ainsi que le LOU et le Stade Rochelais (Top 14) sont dans l'attente. Au MHSC, « nous n'avons pas encore de visibilité puisque l'hiver n'était pas encore là... La facture va certainement augmenter mais nous ne savons pas à quelle échelle ». Même topo du côté du club lyonnais : « La facture augmentera à partir de janvier, nous n'avons pas d'estimation possible à date. » À La Rochelle, « on n'a pas encore reçu la douloureuse ». « Nous avons un système d'abonnement qui nous permet de limiter la casse, mais on s'attend à une très forte augmentation, multiplié par deux voire davantage. »

Cette augmentation, l'OL se la prend frontalement, tel un placage de Jonathan Danty, le centre surpuissant des champions d'Europe en titre. Malgré l'installation de panneaux photovoltaïques et la mise en fonctionnement prochaine de sa centrale associée, les coûts de l'énergie pour alimenter le Groupama Stadium et le centre d'entraînement ont explosé. « Nous avons une augmentation identique à tous les secteurs avec un coût unitaire multiplié par 7. » La douloureuse est vraiment douloureuse...
La facture a aussi augmenté à Monaco, pour deux raisons : la hausse du prix de l'électricité et l'agrandissement du centre d'entraînement, avec un terrain et une tribune supplémentaire. À Nantes, la facture a été multipliée par trois. Ça aurait pu être pire. « Nous avions anticipé cette augmentation en négociant dès mai-juin avant les très grosses augmentations. » Le club canari se dit toutefois très inquiet pour 2023. Comme le LOSC qui, à l'approche de la fin de son contrat, s'attaque à des négociations compliquées, étant donné que « les premières propositions font état d'un tarif multiplié par quatre sur le gaz et par dix sur l'électricité ».
Si le gouvernement a proposé un plan de sobriété, ce n'est pas en raison de l'augmentation des tarifs de l'électricité, mais pour éviter de se retrouver en « black-out », c'est-à-dire une coupure de courant généralisée. En cas de tension sur le réseau, et de signal rouge Écowatt, les clubs devront réduire drastiquement leur consommation pour l'entretien des pelouses, en mettant leur chauffage au seul mode « hors gel » et en limitant la luminothérapie. Ils en ont déjà adopté d'autres. À La Rochelle, les tribunes ne sont plus éclairées pendant les rencontres. Les clubs font désormais attention aux heures de pointe. Selon nos informations, la question des coupures d'électricité n'a pas été évoquée à ce stade entre le ministère des Sports et la LFP. La tenue des matches n'est donc pas remise en question à ce jour. Il faut dire que les clubs ont déjà une solution toute trouvée : les groupes électrogènes.
« Nous avons testé une installation de secours qui nous permettra d'assurer temporairement la continuité de notre activité en cas de coupure du réseau, explique notamment l'Olympique Lyonnais. Depuis l'ouverture du stade nous avons dû nous équiper de générateurs de secours, car ils sont obligatoires dans un ERP (établissement recevant du public). » Le club de Top 14 de la ville, le LOU, est « en train de deviser la mise en place d'un groupe électrogène avec inverseur pour nos espaces réceptifs et Village, qui accueillent des événements au quotidien ».

À Brest, on passera l'hiver tranquille, au chaud, loin de tous ces soucis. Le Stade Francis-Le Blé fonctionne avec un groupe électrogène. « Ce système, qui est à la base une solution de secours en cas de coupure d'électricité, a été choisi comme source principale d'énergie pour éviter de ponctionner le réseau général d'électricité de la ville », indique-t-on au club. Toujours en Bretagne, le Stade Rennais se dit « paré » avec un groupe électrogène « qui prendrait le relais pour assurer le minimum vital mais l'exploitation du stade serait évidemment dégradée ».
Selon nos informations, le gouvernement a demandé à l'ensemble des clubs de les utiliser en cas de tension sur le réseau. Cela permettra le maintien des matches et de leur activité mais ne sera pas sans conséquence sur le climat. Alors que les effets du réchauffement climatique se sont fait sentir cet été, entre canicules à répétition et sécheresses (58 départements sont toujours concernés au 28 novembre, dont 23 en crise), les groupes électrogènes sont particulièrement polluants. Il s'agit en effet d'un moteur thermique, comme les camions ou les voitures, fonctionnant au diesel. Qui émettent donc du dioxyde de carbone, du soufre et des oxydes d'azote. Et participent au réchauffement climatique. Déjà affecté avec des pelouses sous tension pendant l'été, le monde du sport se retrouve donc dans une drôle de posture...