« Ça ne m’intéresse pas de regarder qui est en forme ou qui ne l’est pas parce que dans tous les cas, ce n’est pas toujours ça qui prime pour la sélection. » Ce que Matthieu Jalibert a verbalisé la semaine dernière en conférence de presse aurait tout aussi bien pu sortir de la bouche de Baptiste Serin (30 ans, 46 sélections).
Le demi de mêlée de Toulon l’a démontré ce week-end encore à l’occasion de la victoire de son équipe face aux Harlequins, il affiche une forme resplendissante actuellement. La feinte de passe qu’il a réalisée pour filer à l’essai n’est que l’épiphénomène de cet état de fait. Et pourtant, sauf surprise, son nom ne devrait pas émarger dans la liste des 42 qui sera communiquée par Fabien Galthié, ce mercredi après-midi, dans l’optique du Six-Nations. Ou s’il apparaît, ça ne le destinera qu’à jouer les utilités.
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Les trois strapontins sont promis à l’inévitable Antoine Dupont (28 ans, 55 sélections), capitaine indéboulonnable des Bleus, au jeune Nolann Le Garrec (22 ans, 4 sél.), l’incarnation de l’avenir au poste dans la perspective de la Coupe du monde 2027 en Australie, et à Maxime Lucu (32 ans, 24 sél.), joueur à la régularité et à l’état d’esprit inoxydables.
Sans surprise
L’absence de Baptiste Serin ne fera pas les gros titres. Aussi incongrue qu’elle puisse paraître à la lecture des performances sportives, elle est désormais acceptée. Anticipée. S’il a disputé les Tournois 2020 et 2021 en tant que doublure d’Antoine Dupont, le numéro 9 landais n’a honoré que sept sélections depuis la tournée d’automne 2021. En dépit de l’affirmation de Maxime Lucu sous les maillots de l’UBB et du XV de France durant cette période, en dépit des blessures qui l’ont parfois tenu éloigné des terrains, cela ne reflète ni son talent, ni son influence. Deux qualités qui se sont encore affirmées.
« Il fait partie des meilleurs demis de mêlée français » Dimitri Yachvili
« C’est un joueur qui est arrivé à maturité en tant que demi de mêlée », observe Dimitri Yachvili, l’ancien numéro 9 international, désormais consultant pour France Télévisions : « Il fait preuve de beaucoup de vice, d’expérience. En fait, il semble libéré psychologiquement. La question qu’on peut se poser, c’est : est-ce que c’est le fait de ne plus être dans les papiers (NDLR, du XV de France) ? Mais je pense aussi que l’âge joue. À ce poste, à un moment donné, tu n’as plus de complexe : tu joues librement. Son leadership a augmenté aussi. Avec et sans ballon. Il est pénible, il embête l’adversaire. Il a un vrai poids : il domine, il maîtrise. »
Et pourtant, ça ne suffit pas. Pas aux yeux de Fabien Galthié en tout cas. Baptiste Serin avait été nommé capitaine lors de la triste tournée de juillet en Argentine, comme il l’avait déjà été face à l’Italie en novembre 2021, mais la relation entre les deux hommes ne semble pas fluide. Comme si le sélectionneur suspectait le Toulonnais, leader de vestiaire et joueur de caractère, de ne pas être capable de s’accommoder du rôle de doublure d’Antoine Dupont.
Doute
« J’ai l’impression qu’on considère que soit on doit me mettre titulaire, soit je fais la gueule », se défendait l’ancien joueur de l’UBB durant la préparation à la Coupe du monde 2023. « Et pourtant, j’ai fait deux Tournois en tant que remplaçant de « Toto » (NDLR, en 2020 et en 2021), et ça s’est bien passé ! »
Fabien Galthié ne s’est évidemment jamais avancé sur un tel terrain. Ses justifications ont toujours été techniques, en lien avec le système de jeu du XV de France, ou sportive.
Le Landais a longtemps nourri une frustration face à cette situation. Il aborde désormais la situation avec plus de recul assure son entourage à Toulon. « Vous le connaissez bien à Bordeaux, où vous l’avez connu avec tout son talent », observait en décembre son manager Pierre Mignoni. « Mais je le trouve beaucoup plus régulier dans ses matchs, dans sa façon de s’entraîner. » Le résultat est là, observe Dimitri Yachvili : « Il fait partie des meilleurs demis de mêlée français. » Et cela même s’il ne les accompagnera pas.