Article de lequipe :
"
Auteur de quatre essais en trois matches, Alivereti Raka est le dernier talent issu du partenariat de l'ASM avec une académie aux Fidji.
«Il est assez réservé, il ne dit pas grand-chose, mais au moins, il écoute. Et visiblement, il apprend vite et bien !» La phrase est signée Damien Chouly, le capitaine de Clermont, à propos d’Alivereti Raka. La rapidité, un qualificatif qui colle bien à la peau de la nouvelle pépite de l’ASM (les préparateurs physiques l’estiment à 10’’2 au 100 mètres). Pas très original pour un ailier fidjien, mais depuis trois semaines, Raka affole les défenses du Top 14. Courant mars, les Brivistes (battus 25-6), les Toulousains (32-23) et les Girondins (24-19) ont croisé le phénomène. Le pilier toulousain Census Johnston s’en souvient sûrement. Il doit même peut-être avoir encore quelques brins d’herbe entre les dents : l’accélération de Raka lui a cloué le nez dans le gazon. Ce jour-là, le 20 mars, sur la pelouse du stade Marcel-Michelin, Alivereti Raka avait inscrit deux essais. Deux éclairs et deux raids de soixante mètres qui ont assommé les Rouge et Noir. De quoi ravir les fidèles de l’ASM, orphelins d’une des idoles du Michelin, Napolioni Nalaga, parti l’été dernier à Lyon, et qui avait inscrit plus de 100 essais (104) sous le maillot des Jaunards.
«J'ai eu des doutes sur ses premiers mois», Bertrand Rioux, directeur du centre de formation
Raka est encore loin de son illustre compatriote, mais il part sur de bonnes bases. Après sept feuilles de matches, dont six titularisations, son compteur affiche six essais. C’est moins que Nalaga et ses dix réalisations lors de ses six premiers matches (2007-2008), dont quatre doublés consécutifs, mais c’est mieux que son coéquipier Noa Nakaitaci (3 essais en 24 matches) ou d’autres illustres «Flying Fidjians» comme Rupeni Caucaunibuca, qui a dû attendre son septième match avec Agen en 2004 pour trouver le chemin de l’en-but.
Face à l’UBB, dimanche, Raka a récidivé, en électrisant la défense adverse pour marquer l’essai de la révolte et lancer la folle remontée de l’ASM (mené 19-0, Clermont s’est imposé 24-19). «Raka a su saisir l’opportunité qui s’est présentée. Aujourd’hui, il marque son territoire», sourit Franck Azéma. L’entraîneur en chef de Clermont est déjà sous le charme de ce joueur alliant vitesse, puissance et qualité d’appuis : «Il a ce facteur X. Il a faim de marquer et c’est une bonne chose de pouvoir compter sur un garçon comme lui, capable de faire basculer un match.» Déjà, chez les Espoirs, il s’était bâti une sacrée réputation. «Xavier Sadourny (entraîneur de l’équipe Espoirs de l’ASM) nous fait des retours tous les lundis, raconte Azéma. Il nous répétait : “Il est au-dessus.” On le voyait aussi aux entraînements avec nous. Il fallait juste trouver l’opportunité de le faire rejouer.» Mais après deux belles sorties contre le Racing 92 et Agen durant les fêtes de fin d’année, il s’est blessé à un genou et a été éloigné des terrains plusieurs semaines. C ‘était pour mieux rebondir.
Alivereti Raka a inscrit un nouvel essai dimanche dernier à Bordeaux. (143543+0000,NICOLAS TUCAT/AFP)
Si, aujourd’hui, Raka, qui a débarqué à Clermont en novembre 2014, trois ans après avoir intégré l’académie de Nadroga, semble à l’aube d’une belle carrière, son adaptation n’a pas été évidente. Le Fidjien a mis du temps à «oublier» les 17 000 kilomètres qui le séparaient de son île natale. «J’ai eu des doutes sur ses premiers mois, explique Bertrand Rioux, le directeur du centre de formation de l’ASM. C’était essentiellement sur ses capacités d’adaptation à la culture française. Mais, à aucun moment, je n’ai imaginé qu’il reparte aux Fidji. En plus, Raka était d’une timidité maladive. Il était très introverti, il ne regardait pas dans les yeux. Ça a été dur de briser la glace, de le faire sourire. Mais on a su prendre le temps, qu’il ait confiance en nous. Aujourd’hui, il a la banane !» Son coéquipier et compatriote Peceli Yato, au club depuis 2013 et passé lui aussi par Nadroga, a joué un rôle important dans son intégration.
Voisins de palier, les deux Fidjiens habitent dans des appartements mis à leur disposition au pied du stade Michelin par le club. Raka prend tous ses repas au centre de formation en compagnie des autres jeunes du club. L’ASM emploie deux personnes à temps plein pour gérer au mieux l’intégration sociale des joueurs et plus particulièrement celle des étrangers. Un ensemble qui permet à l’ailier de vingt et un ans d’être aujourd’hui totalement épanoui. «Je sais que venir à Clermont a été une superbe opportunité, a-t-il expliqué sur le site officiel du club. Maintenant, je veux me donner les moyens de devenir un véritable élément de cette équipe.» «Il a cette volonté de vite s’affirmer, estime Rioux. Il est en train de s’imposer et je pense qu’il va faire une grande carrière.» Raka a signé jusqu’en juin 2018 avec l’ASM. À cette date, il sera JIFF (joueur issu des filières de formation) et sélectionnable pour le quinze de France… "