Publié le
samedi 20 avril 2019 à 00:05
| Mis à jour le
20/04/2019 à 01:14
Plus à l'aise, le pilier de Clermont s'est nourri de sa découverte des Bleus, pendant le Tournoi, pour s'affirmer. Avec Clermont, il affronte samedi soir (21 heures) Kyle Sinclker, pilier droit des Harlequins et du XV anglais, en demi-finales du Challenge européen.
Face à lui, ce samedi soir, Étienne Falgoux va découvrir une pile électrique. Kyle Sinckler, le droitier des Harlequins, est un pilier tonique, dynamique, toujours en mouvement, avec sa petite foulée nerveuse et ses interventions décidées. Cette hyperactivité lui a fait une place en équipe d'Angleterre et ce statut d'international (22 sélections), agrémenté d'un passage chez les Lions britanniques et irlandais en 2017, donnera au gaucher de Clermont encore plus envie de s'étalonner lors de cette demi-finale de Challenge Européen.
Falgoux (26 ans) a beau jurer qu'il se concentre sur ce qu'il va « proposer »plutôt que sur ce qu'il va « encaisser », il a pris goût, depuis février, à ces duels contre des joueurs références. C'est sa découverte de l'équipe de France qui lui a ouvert l'appétit. Mi-février, après un match de Top 14 contre l'UBB, il apprenait qu'il était convoqué par Jacques Brunel pour le Tournoi, afin de remplacer Dany Priso, blessé. Surprise de la nouvelle, précipitation des préparatifs pour rallier Marcoussis, interrogations sur son sort. Mais, surtout, dit-il, de la « curiosité ».
« Tout le monde me disait "tu verras, les matches internationaux, ça va plus vite, ça tape plus fort"... J'étais curieux de voir ce que ça donnait, se remémore-t-il. Et j'ai découvert que ça va effectivement plus vite qu'en Top 14. Les impacts ne sont pas forcément plus âpres, ni la mêlée d'ailleurs. C'est dans le jeu courant que c'est différent. Ça bouge tout le temps, il n'y a pas de temps de repos. »Difficile, l'adaptation contre l'Écosse (27-10, le 23 février) ? Il fait la moue. « Les premières sensations ont été bonnes et, avec l'adrénaline, l'excitation, tu te mets vite au niveau de l'exigence du rugby international ». Falgoux a enchaîné par une grosse heure de souffrance collective contre l'Irlande (14-26, le 10 mars), en remplacement d'un Jefferson Poirot blessé, puis par une titularisation solide en Italie (25-14, le 16 mars). Pour revenir en club comme changé. C'est Benjamin Kayser qui le disait spontanément un soir de démonstration de la mêlée jaune et bleu à Agen (13-28, le 23 mars) : « Étienne a pris beaucoup de maturité en quelques semaines ».
«Il a compris que s'il voulait exister, il fallait monter le curseur» Didier Bès, entraîneur de la mêlée clermontoise
Jusque-là, l'Auvergnat pur jus, formé au club, s'était fait une place progressivement, après avoir touché au groupe pro en 2015, pendant que Vincent Debaty se débattait avec les Bleus en Coupe du monde. « J'ai entendu dire qu'au club, certains pensaient alors qu'il n'avait pas forcément le potentiel, s'étonne presque Didier Bès, coach de la mêlée clermontoise. Il n'a jamais fait de sélections en jeune. Mais c'était déjà un travailleur, à l'écoute. » Numéro quatre au poste, derrière Thomas Domingo, Raphaël Chaume et Vincent Debaty, Falgoux a fait son trou patiemment, s'offrant un strapontin de remplaçant lors du Brennus de 2017. Pour maîtriser aujourd'hui les bases du poste. « Il avait besoin de comprendre que la mêlée est un combat quotidien face à un adversaire qui va vouloir le dominer, explique Bès. Il manquait d'agressivité. Pour en avoir discuté avec lui, il a compris que s'il voulait exister, il fallait monter le curseur. »
Pilier léger (110 kg) et cavaleur, « Étienne est un athlète qui a le profil du pilier moderne, qui se déplace, conteste, est efficace en défense », décrit Bernard Goutta, entraîneur des avants. Falgoux, lui, reconnaît qu'il doit « plus porter le ballon, être plus décisif avec, prendre des initiatives et ne pas se contenter des taches obscures ». On lui réclamait déjà ça en Espoirs. « C'était peut-être dû à une forme de timidité, à ne pas vouloir m'imposer sur des choix avec le ballon ».
Ça ne l'inhibe plus aujourd'hui. La sélection a fini de le libérer, quand elle peut en paralyser d'autres, surtout dans la spirale des résultats actuels. « J'avais besoin de savoir ce que je valais sur des gros matches comme ça. J'ai grandi là-dedans, j'ai pu me jauger face à des adversaires costauds, dans des matches très tendus où le contexte n'était pas évident, se réjouit-il. Ça m'a permis de mieux me connaître. » Et de s'avancer vers un duel comme celui de ce samedi soir sans aucun complexe.