Cette saison, Sipili Falatea enchaîne les feuilles de match avec l’ASM. Le pilier, en progrès constant, devient peu à peu une solution crédible à la droite de la mêlée clermontoise. Sans l’aide de ses frères et notamment celle de Tapu, tout cela n’aurait pas été possible.
Futuna, petite île de Polynésie occidentale située à 16.000 kilomètres de la France métropolitaine. Sur ce petit bout de terre paradisiaque, l’offre sportive n’est pas très variée lorsque l’on est un gamin épris de grands espaces. Il y a quelques années de cela, le rugby était encore un sport confidentiel. Le jeune Sipili Falatea ne le pratiquait pas avec ses amis. Pour lui, le ballon ovale est avant tout une affaire de famille.
Nous sommes en 2003. Taofifenoa Falatea, l’aîné de la fratrie de six frères et trois sœurs, est contraint de stopper sa carrière de rugbyman après une grave blessure au genou. Il venait juste de signer à Auch en Top 16. Meurtri, il décide alors de rentrer à Futuna. C’est alors que Taofifenua va faire découvrir ce sport à ces frères. Un véritable coup de foudre pour le petit Sipili. « Il n’y avait pas vraiment de sport là-bas, se souvient le Clermontois. Avec mes amis nous étions tout le temps dehors, mais au foot je suis nul. Le volley, ça va un peu mieux mais je préférais largement le rugby. C’est notre grand frère qui nous a tous converti à ce jeu. »
Avec son cousin Yoram Moefana
Sipili n’est pas le seul de la fratrie à se prendre d’amour pour le rugby. Tapu, de neuf ans son aîné, est lui aussi piqué par le ballon ovale. Si bien qu’il devient le premier futunien à signer un contrat professionnel. Après de bons débuts en Fédérale 1 avec l’USA Limoges (de 2011 à 2013), Tapu Falatea est vite repéré et va grimper les échelons. Colomiers, Narbonne en Pro D2 puis Castres et Agen en Top 14... le grand frère devient un véritable phare pour Sipili. Et forcément un modèle à suivre puisque lui aussi évolue au poste de pilier.
Pendant quelque temps, Sipili a vécu chez lui avec à ses côtés son cousin Yoram Moefana... Le prodige bordelais qui n’est autre que le fils de Taofifenoa Falatea, l’aîné de la famille qui avait tenté l’aventure française une décennie plus tôt. Une famille soudée donc, au sein de laquelle Tapu a joué le rôle de protecteur.
"Si Tapu n’avait pas été là je n’aurais pas atteint ce niveau"
SIPILI FALATEA (Pilier droit de l'ASM)
« Quand je suis arrivé en France, Tapu était mon plus grand repère. Il a été comme un père pour moi. Yoram est arrivé avant moi. Nous avons été éduqués de la même façon par mon grand frère. Il nous a beaucoup aidés pour notre carrière de rugbyman. Quand on arrive de si loin ce n’est pas facile. Surtout quand il n’y a pas les parents. Grâce à Tapu, cela a été bien plus facile de s’adapter à la vie en France. Car ce n’est pas du tout pareil qu’à Futuna », se remémore le pilier clermontois.
Les conseils de Tapu, le spécialiste de la mêlée
Son grand frère n’a pas été seulement le père de substitution, il a également permis à Sipili de parfaire sa technique de joueur. Tapu Falatea, solide pilier, suit avec attention les pas et la carrière de son cadet. Il le conseille, il lui fait rectifier des choses et notamment dans le secteur de la mêlée qui n’est pas le point fort de Sipili.
« C’est lui qui m’a inculqué les bases au poste de pilier. S’il n’avait pas été là je n’aurais pas atteint ce niveau. Aujourd’hui, il est encore présent pour moi. Dès que j’ai du temps disponible je vais le voir. Lui, il regarde mes matchs. Il sait que l’on n’a pas le même profil de pilier. Il est plus axé sur la mêlée et il m’aide beaucoup là-dessus. Tapu savait très bien que cela allait être un point à améliorer pour ma carrière. Il me parle beaucoup de technique et me permet de m’adapter à l’adversaire. »
On imagine alors les frères Falatea simuler des mêlées dans le salon familial. « Mais j’évite quand même de trop pousser avec lui, il est beaucoup plus fort que moi. » Après tout, c’est au contact des plus forts que l’on apprend le mieux...
Arnaud Clergue