Teddy Thomas et Damian Penaud, chacun bien calé sur une aile droite, risquent de ne pas beaucoup se croiser directement, samedi après-midi à l'Arena. Mais le Racingman et le Clermontois vont se livrer un duel à distance intrigant, parce qu'ils constituent tous les deux une menace offensive d'une puissance rare et d'un potentiel peu commun à ce poste dans le rugby français. Joueurs spectaculaires, qui peuvent à chaque instant faire jaillir une étincelle offensive et faire basculer un match, ils partagent aussi des points communs hors du terrain, tant ils ont pu être suspectés d'une certaine forme de nonchalance.
À quelques jours de l'annonce de la liste des 42 joueurs retenus pour préparer le premier match du Tournoi des Six Nations, la première de l'ère Galthié, Thomas et Penaud seront scrutés de près. Cédric Heymans, ancien ailier de Toulouse et des Bleus (59 sélections), a accepté de comparer les deux phénomènes.
L'attaque
« C'est un pur ailier, un finisseur, un joueur qui va breaker sur très peu d'espaces, avec un gros punch, parce qu'il est plus explosif que Damian. Thomas et Penaud ont tous les deux des qualités de vitesse, mais pas de la même façon. Thomas est rapide très tôt, il est très fort sur les jambes, avec des fessiers très développés. Quand Penaud a une foulée plus longue, qui en fait un sprinteur très rapide sur une longue distance. Thomas, lui, vient finir des coups, et parfois peut en oublier quelques partenaires. Pour moi, tant qu'il n'est pas gourmand, c'est une qualité, parce que ça veut dire qu'il a le sens aigu de la ligue. Il faut aimer ça quand tu es ailier ! »
« Il a une éducation de trois-quarts centre, ce qui fait de lui un ailier très mobile. Il se balade aux quatre coins du terrain, comme un électron libre, et ça plaît à ses entraîneurs. Il n'est pas un ailier typique, dévoreur de lignes. C'est un centre-ailier à la reconversion réussie avec un côté joueur-passeur qu'ont peu d'ailiers. Sur tous les ballons hauts, il est incroyable, avec un sens hyper aigu du timing. Clermont l'utilise beaucoup sur les coups d'envoi. Il jumpe presque aussi haut qu'un bloc de saut, avec zéro complexe ! »
La défense
« Thomas a une défense d'ailier, parce qu'il est formaté pour ce poste. Dans la défense de ligne, sur les un contre un, il est plus sérieux. Dans les duels, il est consistant. Comme Penaud, il n'a pas trop la culture du jeu au pied. »
« Plutôt que de parler d'égarements défensifs, comme ça a pu lui être reproché parfois, il faut valoriser ses anticipations et ses interceptions. C'est dur d'être fort sur l'homme et en même temps de guetter ça. Il ne défend pas comme un ailier. Il sent les coups et monte hyper haut, à la même hauteur que ses deux centres, pour couper les extérieurs et empêcher de déclencher du jeu au large. »
Le mental
« Thomas a malheureusement été freiné par un enchaînement de blessures, mais dans le comportement, ça fait un moment qu'on n'a pas entendu parler de lui. Il est constant, cette saison : il a marqué neuf essais en neuf matches. Ça montre qu'il retient ses leçons. »
« J'ai trouvé intéressant qu'il dise qu'il avait été sanctionné face à Castres pour son mauvais match contre Toulon. Il sait pourquoi il n'a pas joué et il apprend. Comme Thomas, il joue décomplexé, il est capable de relativiser. Pour les deux, ça peut amener de petites erreurs de comportement, mais regardons le verre à moitié plein : ils gèrent la pression ! »