On fait dire ce que l’on veut aux chiffres. Mais il arrive parfois que certaines statistiques soient éloquentes. Lors de la présentation du projet sportif de l’ASM en début de semaine, Christophe Urios s’est arrêté sur deux données expliquant les difficultés rencontrées la saison dernière. Les Clermontois possédaient le meilleur taux d’occupation du Top 14 avec 53,1 %. Dans le même temps, les joueurs de Christophe Urios affichaient le plus faible ratio dans l’utilisation du jeu au pied (540 soit 272 coups de pied de moins que l’UBB leader en la matière). Et cela ne fut pas sans conséquence sur le rendement de l’équipe. « On a la capacité à avoir les ballons avec notamment le travail des avants et la conquête. Mais pour jouer chez les adversaires, on porte beaucoup le ballon à la main. On est capable de faire des choses intéressantes et de mettre en danger n’importe quelle défense. Mais cela veut dire aussi que l’on s’épuise beaucoup pour rien. Et donc on n’a plus la lucidité et la précision dans les zones de marque. Et c’est d’autant plus vrai quand on joue à l’extérieur », analyse Christophe Urios. Castres, Bayonne, La Rochelle, Pau… Les exemples ne manquent pas. Sans un jeu au pied efficace, une équipe ne peut pas exister à haut niveau. En tout cas, pas sur la longueur d’une compétition aussi exigeante que le Top 14.
Un Anglo-saxon qui parle parfaitement français
Le recrutement de Benjamin Urdapilleta, un vrai spécialiste, a été réalisé pour rectifier en partie le tir au poste d’ouvreur. Mais le problème reste avant tout collectif. Et là, il n’y a pas d’autres solutions que le travail et la répétition des gammes. Christophe Urios a donc décidé de s’attacher les services d’un vrai spécialiste pour que le jeu au pied ne soit plus un secteur tabou du côté du Michelin. Ian Vass, jusqu’alors entraîneur de la défense à Northampton, a débarqué en Auvergne pour prendre les choses en main. « On départ, on avait missionné Benson Stanley sur le projet, avoue Christophe Urios. Mais lorsqu’il a pris la décision de partir à Montpellier il fallait absolument que l’on trouve quelqu’un. Dans le staff, on avait réparti des points qu’il fallait absolument améliorer. Le jeu au pied en fait bien sûr partie, tant sur le plan stratégique que technique. Le profil de Ian Vass était intéressant. C’est un Anglo-saxon qui parle parfaitement français. Il connaît le Top 14, il jouait demi de mêlée… Par report à nos joueurs, c’est bien de l’avoir. »
Mise en application dès le premier entraînement
Et pas de temps à perdre. Dès le premier entraînement collectif aux Gravanches, le technicien a regroupé tous les trois-quarts présents pour des petits ateliers. Face à face, à dix puis à vingt mètres, les joueurs s’échangent des passes en alternant bon et mauvais pied. La posture est également particulièrement scrutée. « Avance les épaules »... « On reste bien équilibré et droit »... « On cherche à être le plus précis possible » Il ne s’agit pour le moment que de simples exercices, mais ils traduisent bien la volonté de mettre l’accent sur cet aspect du jeu. « C’est quelque chose que je faisais déjà tout seul, explique Anthony Belleau, mais nous avons besoin de le travailler collectivement. Ce sont des routines qu’il faut mettre en place tout de suite pour que tout le monde puisse en bénéficier, au fur et à mesure de la saison. Cela nous apportera que du positif, j’en suis certain. » Les statistiques et surtout l’impression laissée sur le terrain le diront rapidement.
Arnaud Clergue