« Je vois ton McIntyre et je te relance d’un Carbonel. »
Bernie regarda par-dessus ses cartes graisseuses. La loubarde, sorte de lumignon fabriqué à partir d’une boîte de pâté et de savon liquide, distillait une lumière poisseuse dans la cellule sur-occupée où les affranchis trompaient l’ennui en dépit de l’extinction des feux. L’air était plus épais que l’humour d’un représentant de commerce au sortir d’un repas arrosé à l’Hôtel des Maquignons et du Négoce réunis de Romorantin. Bernie hésitait à surenchérir. Déjà un filet de jour gris s’insinuait à travers les barreaux qu’il avait maintes fois tenté de scier en vain avec la tranche d’un calendrier des Dieux du Stade.
« Ton Carbonel et un Kelleher pour faire le blot. »
« Mais ça vaut plus rien, ça un Kelleher ! » s’insurgea José Nascimento Abreu de Bonfim da Costa Dos Santos, dit Johnny La Mort.
« Six heures et demie, réveil général, » bieurla le haut-parleur du couloir et signifiant la fin de la partie, au long soupir de Bernie qui était prêt à lâcher son dernier Paul Sackey pour éviter de montrer sa paire de 3.
Peu après la toilette rudimentaire effectuée dans la boîte de pâté qui avait servi d’éclairage, un maton ivre dès l’aube donna un coup de trousseau de clefs dans la grille du judas de la cellule.
« Laporte au parloir »
Bernie Laporte qui avait occis sa propre mère pour vider son PEL et faisait couramment chanter ses cousines à la sextape se demandait qui de sa famille pouvait bien se présenter à la maison d’arrêt de Fresnes.
La suite au prochain numéro !