Posté 14 décembre 2024 - 07:31
Équipe du jour :
Clermont, qui a décroché samedi dernier un bonus offensif contre Trévise en usant de ballons portés, affronte le Leinster, dont le jeu davants millimétré fait merveille dans ce secteur.
RICHARD ESCOT
Christophe Urios, le coach clermontois, sait à quoi sattendre ce soir à Dublin. « Les joueurs du Leinster savent tout bien faire : les mauls, la mêlée, les lancements, tenir le ballon Ils sont diaboliques : ils te mettent sous pression par leur vitesse, leurs angles de course et leurs qualités techniques, et tusent à défendre devant ton en-but. Il faut être à la fois extrêmement engagé pour leur taper dedans et aussi extrêmement rigoureux et discipliné, sinon on passera laprès-midi à défendre sur des mauls face à Porter, Snyman, Doris et toute la clique, qui sont très efficaces et savent parfaitement jouer avec la règle. » Effet miroir, le pack clermontois affronte donc son alter ego, agglomérat davants rompus aux ballons portés.
Ancien entraîneur adjoint du quinze de France, aujourdhui directeur du rugby à lASM, Didier Retière confirme la teneur de cette opposition : « Les Irlandais jouent avec beaucoup de vivacité les ballons portés derrière pénal-touche et ajoutent de lincertitude en utilisant des leurres pour aller dans le fermé, dans laxe ou au large » Soulagés davoir obtenu un succès bonifié (28-0) grâce à quatre essais sur maul samedi dernier à Marcel-Michelin face à Trévise, les Clermontois sont donc condamnés à hisser leur ni-veau de jeu à lAviva sils ne veulent pas sombrer. Membre de la commission des règles de World Rugby de 2014 à 2022, Retière considère aussi que le ballon porté a beaucoup de vertus : « Il permet à une équipe moyenne ballottée par ladversaire de rester dans le match, et à une équipe dominante dans ce secteur de marquer psychologiquement ladversaire. »
Avec une prise minimale de risques, ça génère beaucoup de bénéfices''
OLIVIER MAGNE, EX-CAPITAINE DU QUINZE DE FRANCE
Consultant pour la chaîne LÉquipe, Olivier Magne regrette pour sa part que ce soit « limitant », mais constate que cest dune efficacité redoutable. « Avec une prise minimale de risques, ça génère beaucoup de bénéfices, reconnaît lancien capitaine tricolore. Reste que pour certaines équipes, cest une finalité plutôt quun moyen de lancer le jeu. » Au point dêtre une plaie quon oppose au jeu de mouvement ? « Non, assure Pierre Villepreux, ancien sélectionneur, notamment du quinze de France. Le maul est une lutte collective pour faire avancer le ballon. » Pour ladversaire, précise Dimitri Szarzewski, entraîneur adjoint chargé des avants du Racing 92, « ça demande du travail, mais il y a plusieurs façons dempêcher un maul de se former. On peut défendre en lair en interceptant le ballon, faire tomber le preneur de balle dès quil touche le sol, sinfiltrer très vite dans les intervalles disponibles, laisser une zone libre pour que ladversaire sengouffre dedans et se retrouve enfermé comme dans un étau. »« En sopposant immédiatement en bas pour neutraliser la première avancée ou en désaxant ce ballon porté », ajoute Magne.
Il fut un temps question dobliger léquipe attaquante à sortir la balle du maul à lissue du premier arrêt, règle « testée en Afrique du Sud avec les U20, mais, pour linstant, ce nest pas concluant », note Joël Jutge, depuis 2021 responsable de la performance et du développement des arbitres inter-nationaux. Reste à autoriser de nouveau, comme ce fut le cas en 2008, lécroulement du maul. Mais, principalement pour des raisons de sécurité des joueurs, World Rugby ne veut plus en entendre parler.
Un moment de combat
Il y a seize ans, donc, le ballon porté derrière pénaltouche est devenu larme fatale du rugby. Avant cela, dans les années 1970, Béziers et Montferrand sillustrèrent dans lart de ce maul qui avance, tout comme lAngleterre et Toulon dans les années 1980, avant que la tortue béglaise emporte tout sur son passage, dix ans plus tard. « Comme la mêlée, le ballon porté est un moment de combat collectif très fort, un bel endroit de cohésion, souligne Xavier Pemeja, entraîneur de Nevers (ProD2). Et vous nimaginez pas la subtilité de cette phase de jeu, avec ses serrages, ses liens, ses placements » Le ballon porté offre aussi une cascade davantages, dixit Pierre Villepreux, qui fit partie entre 2005 et 2010 de la commission de lIRB qui élabora cette règle : « Léquipe qui parvient à amener le jeu dans les 5 mètres adverses par une pénalité dispose du lancer, puis de la possibilité de lever son sauteur, qui est protégé, et enfin de linterdiction pour la défense décrouler ce maul qui avance. » Ainsi offerte, il serait vraiment dommage de se priver dune telle manne.
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