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Quelquun aurait il larticle svp?
Il y a des soupirs qui ne trompent pas. Celui du troisième-ligne international Paul Boudehent, le 20 août dernier, au centre de performance du Stade Rochelais, révélait comme une lassitude, presque une exaspération. La prépa estivale des Maritimes en était alors à sa sixième semaine, déjà une éternité.
« Moi, je ne suis pas bodybuilder, je suis joueur de rugby, nous confiait Boudehent. Je ne suis pas payé qu'à faire de la prépa, j'ai envie de jouer au rugby. Là, on a mis un mois à toucher du ballon, on a fait des allers-retours sur le terrain, de la muscu, pff... Je n'en veux pas au staff, attention, parce que c'est nous qui nous sommes mis dans cette situation. On est les seuls responsables. »
En terminant 7e du Championnat, un point derrière la dernière place qualificative pour la phase finale, La Rochelle a en effet bouclé sa saison le 8 juin, soit beaucoup plus tôt que d'habitude. Conséquence ? Une reprise le 14 juillet avec, dans la foulée, un gros bloc de quatre semaines exclusivement consacrées à fuseler les corps.
« L'objectif était de faire du foncier pour gommer ces lacunes physiques qui nous empêchaient l'an passé de bien terminer les matches ou de bien les commencer, expliquait en début de semaine le talonneur Quentin Lespiaucq. L'idée, c'était qu'on soit plus "fit", qu'on coure plus longtemps et qu'on soit vraiment équipé pour bien commencer la saison. Ça faisait longtemps que le club n'avait pas vécu une aussi longue présaison. » Longtemps aussi qu'un joueur comme Grégory Alldritt, pour ne citer que lui, n'avait pas semblé aussi affûté à l'aube de démarrer une saison.
Les (bons) souvenirs des trois mois de prépa du printemps 2020
Directeur de la performance du Stade Toulousain, Allan Ryan sait aussi les bienfaits d'une longue préparation. Il dit d'ailleurs ne pas avoir été surpris par la réussite des clubs français, et en particulier de celle des Rouge et Noir (un doublé Coupe des champions-Top 14 à la clé), lors de la saison 2020-2021.
C'était la première saison post-Covid, et les pensionnaires de l'élite, à l'arrêt depuis l'annulation du Championnat à la mi-mars, avaient alors profité de trois mois de préparation avant d'attaquer la saison suivante. Est-ce d'ailleurs un hasard si, depuis cette date, la Coupe des champions n'a plus jamais échappé à un club de l'Hexagone ? « Je ne crois pas, souffle Ryan. Les clubs français ont vraiment progressé grâce à cette coupure. »
Depuis, pourtant, l'Irlandais doit se plier à un autre rythme. Lui qui pouvait parfois compter sur dix à douze semaines de prépa lorsqu'il travaillait en Angleterre, notamment chez les Wasps, doit désormais se contenter de quatre semaines pour rendre les joueurs toulousains les plus compétitifs possibles avant la première journée du Championnat. « En tant que prépa, bien sûr que j'aimerais avoir plus de temps, admet-il. Mais si je dis aux mecs qui sortent d'une magnifique saison qu'ils n'auront que quatre semaines de vacances au lieu de six, il y a peu chance que je devienne très populaire dans le vestiaire (rires) ! Du coup, on leur laisse six semaines de congé avec un programme d'exercices à respecter. C'est la décision d'Ugo (Mola, le manager), qui a confiance en ses joueurs, et on se rend compte qu'ils la lui rendent bien. »
Des reprises étalées entre le 9 juillet (Pau) et le 11 août (internationaux toulousains)
Cet été encore, les internationaux toulousains ont repris les derniers, le 11 août, soit presque un mois après Pau (le 9 juillet), La Rochelle (le 14), Montauban (le 14), le Racing 92 (le 15), le Stade Français (le 15) et Lyon (le 15). Les non-internationaux, eux, ont recommencé une semaine avant, le 4 août. Parmi eux figurait Paul Costes. « Le staff essaie de nous laisser au moins cinq semaines de congé, tout en nous prévenant que si on ne fait rien pendant ces cinq semaines-là, la reprise risque d'être complexe, narre le jeune centre. Ce gros laps de temps est important, ça nous permet d'avoir le sentiment de changer de saison et de ne pas être dans un prolongement et une continuité de celle d'avant. On a alors vraiment le sentiment de passer à autre chose. »
Bien sûr, Toulouse doit aller vite à l'essentiel et injecter dès le départ des jeux avec ballon à ses séances pour permettre aux joueurs de retrouver leurs repères et leurs automatismes en un minimum de temps. « Avec trois semaines de plus, c'est sûr qu'on pourrait faire davantage de travail de fond, reconnaît Ryan. Mais là, en quatre semaines, je ne peux pas me permettre de proposer une semaine avec ballon et une autre sans ballon, d'autant qu'on avait aussi deux matches de préparation à négocier (contre Vannes et Bayonne).
En fait, on a très peu de temps pour préparer le premier match de Top 14, les touches, la défense, les ballons portés... Mais c'est souvent comme ça ici ! Après, je préfère avoir ce rythme et continuer à gagner des titres ! » « Forcément, on a moins de temps pour se mettre en place, ajoute Costes. Mais on a la chance d'avoir un plan de jeu et des joueurs qui n'ont pas trop changé par rapport aux années précédentes. Donc, on se connaît. »
Jusqu'ici, le Stade Toulousain a toujours réussi à compenser son déficit de préparation par le talent, le professionnalisme et l'état d'esprit de ses joueurs, qui restent des compétiteurs hors pair. Mais il y a toujours des écueils. Celui d'essayer d'aller plus vite que la musique en est un. Les blessures musculaires guettent et n'ont pas épargné les Rouge et Noir depuis la reprise (Épée, Thomas, Colombe...). « C'est compliqué à gérer, parce que quand les joueurs ne sont pas forcément à 100 %, il y a toujours un risque », admet Ryan.