L'équipe du jour :
RUGBY
Lapandry s'est affranchi
AURÉLIEN BOUISSET
APRÈS UNE SAISON DIFFICILE, LE TROISIÈMELIGNE S'EST RÉINSTALLÉ DANS LE PACK AUVERGNAT, OÙ IL A AUGMENTÉ SON ACTIVITÉ.
CLERMONT-FERRAND – Pour démontrer un changement de statut, il n'y a parfois pas beaucoup plus parlant qu'un simple chiffre. Cet après-midi, pour le match qui va décider de l'avenir européen de Clermont, Alexandre Lapandry va connaître sa douzième titularisation de la saison. Quand, sur l'ensemble de la saison dernière, le troisième-ligne de l'ASM n'en avait accumulé que quatorze. Dont aucune dans les matches couperets de Top 14 ou de Coupe d'Europe, dont les Jaunards avaient pourtant atteint les finales...
À l'écart de la double épopée auvergnate, Lapandry (26 ans, 10 sél.) avait d'ailleurs commencé à gamberger. «La saison dernière a été compliquée, il y avait de la frustration parce que je ne jouais pas les gros matches », dévoilet-il. Au point d'hésiter sur son avenir, alors qu'il arrivait en fin de contrat à l'été 2016. « Je me suis posé la question de partir pour m'épanouir », poursuit-il. Le flanker a alors demandé du temps à ses dirigeants pour réfléchir à la proposition de prolongation qui lui était soumise, et étudier les touches concrètes avec d'autres clubs. Pour finalement décider, début décembre, de se réengager quatre années supplémentaires, jusqu'en 2020. « Ça m'a pris trois mois! en sourit-il. Les coaches ont eu le bon discours...»
Les mots de Franck Azéma ? «C'était légitime qu'il se pose des questions, se souvient l'entraîneur de l'ASM, parce que les trois ou quatre dernières années, il ne jouait pas souvent les grands événements. Je lui ai dit que notre recrutement était tourné vers la puissance, avec des profils comme celui de Flip Van der Merwe (déjà au club) ou Sitaleki Timani (qui arrivera en fin de saison) pour plus de complémentarité avec le sien. Et son choix de rester l'a peut-être libéré. » Mais on ne devient pas titulaire dans une troisième ligne très concurrentielle juste en gagnant en confiance. Si Alexandre Lapandry s'est installé, c'est qu'il a étoffé son jeu. Un de ses anciens coéquipiers, Julien Bonnaire, l'a bien remarqué. Le néo-Lyonnais faisait de l'ombre à son jeune partenaire, au profil similaire, ces dernières années, mais les deux hommes ont tissé un lien assez fort. « C'est qu'on a gagné le Brennus côte à côte en 2010 et qu'on était tous les deux du Grand Chelem la même année!» rappelle Bonnaire.
"Il est plus dur au plaquage et plus agressif au nettoyage" JULIEN BONNAIRE
Ils se téléphonent encore souvent, échangent sur le jeu. Et l'aîné observe les progrès : « Alexandre a toujours la même activité, il est toujours aussi impressionnant au plaquage comme dans le soutien à ses partenaires, mais il met plus d'activité dans le jeu, il est plus dur au plaquage et plus agressif au nettoyage. » Réputé pour son taux de réussite irréel au plaquage le dernier qu'il a raté cette saison remonte... au mois d'août comme pour le liant qu'il donne au jeu entre les avants et les trois-quarts, Lapandry a cherché à étoffer son registre.
«J'ai gagné en puissance pour mettre plus d'impact dans le combat. Je veux davantage marquer mon adversaire. Je suis monté régulièrement en poids, là j'en suis à 104-105 kg », soupèset-il, lui qui lors de sa première cape, à vingt ans, en 2009, était annoncé à 97 kg.
«Je cible mieux mes actions, je m'éparpille moins pour être plus efficace ! Je prends aussi plus de responsabilités sur le terrain, relève-t-il en accélérant le débit. J'ai été capitaine de touche plusieurs fois, quand Damien (Chouly) ne jouait pas. C'est un grand plaisir ! Et j'ai été capitaine lors de certains matches du début de saison... un honneur, une fierté ! » Un choix qu'Azéma explique : « Il a pris une aura supplémentaire, je peux m'appuyer sur lui parce qu'il est intègre et vrai dans tout ce qu'il dit. Il est très enthousiaste et a une façon de vivre le rugby presque à l'ancienne, je dirais ! Et c'est un garçon du sérail qui représente les valeurs du club.»
Plus complet, il s'épanouit en club. De quoi repenser à l'équipe de France, lui qui a enchaîné les sélections gamin mais n'a plus été rappelé depuis 2014 ? « Je serais un menteur si je disais que ce n'est pas dans un coin de ma tête ! admet-il. Mais je n'en fais pas une fixation. Je veux rattraper le wagon, mais sans me prendre la tête avec ça ! »