« Ça a été très dur, il avançait au jour le jour » : débarrassé d'un souci de santé rare, le Toulousain Kalvin Gourgues éclot enfin en Top 14
Retardé en raison d'un problème de santé, le centre Kalvin Gourgues (20 ans) semble enfin prêt à éclore sous les couleurs du Stade Toulousain comme l'atteste son début de saison. Découverte d'un crack annoncé.
Trois matches joués et déjà deux présences dans le « quinze type » du week-end de L'Équipe (il postulait même pour un triplé le week-end dernier). Loin de nous l'idée de penser que cette distinction fait foi et ne souffre aucune contestation. Pour autant, à seulement 20 ans, Kalvin Gourgues brille en ce début de saison. En évoluant à un poste - centre - très fourni au Stade Toulousain (Ahki, Barassi, Chocobares, Costes, Delibes ou Thomas pour ne citer qu'eux).
Mais il ne s'agissait pas d'un baptême du feu pour le Toulousain. Le trois-quarts polyvalent a fait ses débuts pros presque deux ans auparavant, lors d'un déplacement à Pau (13-9), le 5 novembre 2023. À seulement 18 ans, comme d'illustres prédécesseurs : Frédéric Michalak, Clément Poitrenaud (aujourd'hui son entraîneur) ou plus récemment Romain Ntamack. Que des cracks.
Depuis qu'il a intégré les rangs du Stade Toulousain, à l'âge de 12 ans, après des débuts à Grenade-sur-Garonne (1h30 au nord-ouest de Toulouse), Gourgues est sur toutes les lèvres au sein du club Rouge et Noir, avec lequel il a déjà bien garni son palmarès chez les jeunes (Champion de France Crabos en 2022 et double champion de France Espoirs en 2023 et 2024). « Il a l'ADN du Stade Toulousain bien ancré en lui », sourit son coéquipier, le trois-quarts centre Pierre-Louis Barassi.
Mais la pépite annoncée, sous contrat jusqu'en juin 2028, a vu son destin stoppé par un souci de santé rare : un caillot de sang dans l'artère poplitée de la jambe gauche, celle qui passe derrière le genou pour vasculariser toute la jambe. D'abord des crampes, ensuite une insensibilité des orteils, puis du pied et de la cheville, les symptômes sont incompatibles avec la pratique du rugby. Traité une première fois en 2023, le jeune toulousain rechute à l'été 2024. Idem après un nouveau traitement chimique pour fluidifier le sang.
Une nouvelle artère est créée derrière son genou
Malheureusement, son artère se bouche encore et encore. Le caillot de sang revient inlassablement. S'en suivent plusieurs mois de galère. Début 2025, Gourgues subit finalement une intervention chirurgicale, plus lourde. Une nouvelle artère est créée avec une veine extraite de sa cuisse puis suturée à la place de celle endommagée derrière son genou gauche. Après plusieurs semaines de convalescence, le centre finit par retrouver la compétition en fin de saison dernière. Trois matches avec les Espoirs vécus comme une libération.
Les stats de Kalvin Gourgues et de Pierre-Louis Barassi.
Dans la foulée, il est même sélectionné pour la Coupe du monde des moins de 20 ans en Italie. Il dispute quatre matches, dont la demi-finale (défaite 34-26 face à la Nouvelle-Zélande) et le match pour la troisième place (défaite 38-35 face à l'Argentine) dans la peau d'un titulaire. « Ça a été très dur, il avançait au jour le jour, se remémore Cédric Laborde, le manager des Bleuets. Il a été très patient. Le club l'a très bien accompagné. Nous avons beaucoup échangé avec Jérôme Cazalbou (le manager du haut niveau). » Cet été, Gourgues, qui peut jouer arrière, ouvreur ou centre, a participé à la préparation estivale avec le groupe pro des triples champions de France en titre.
Remplaçant pour l'ouverture de la saison à Clermont (victoire 24-34), il est entré dès la 13e minute de jeu à la place de Pita Ahki (commotion), il a enchaîné par une titularisation pour la réception de Perpignan (nouvelle victoire 31-13), avant d'être laissé au repos pour le déplacement à Montpellier (défaite 44-14) puis de retrouver sa place, numéro 12 dans le dos, pour un large succès face à Castres (59-12). Trois prestations très abouties (pour trois victoires) comme en attestent ses statistiques individuelles.
« Kalvin a passé des moments compliqués il y a quelques mois, et là, il est effectivement en pleine possession de ses moyens, jugeait Jean Bouilhou, l'un de ses entraîneurs, après ses deux premiers matches. C'est un joueur qui, depuis tout petit est ciblé ici au club, on sait qu'il a énormément de talent, et là il est en train de le confirmer. On voit qu'il a beaucoup d'appétit et qu'il est physiquement très costaud malgré ses vingt ans. »
« Ce qui va lui manquer, c'est de l'expérience. Il va devoir aussi gérer ses émotions. Il a parfois tendance à râler car il est très exigeant envers lui-même »
Cédric Laborde, manager des Bleuets
« Il a tous les outils, abonde Laborde. Il est capable de jouer les duels, d'être fort au contact, de jouer devant ou dans la défense, de taper au pied, il défend fort, il bute. En plus, il est doté d'un physique proche des standards internationaux. Il accélère fort, il va vite, il est très puissant. Ce qui va lui manquer, c'est de l'expérience. Il va devoir aussi gérer ses émotions. Il a parfois tendance à râler car il est très exigeant envers lui-même. »
« C'est un garçon qui a besoin d'espaces, précise notre consultant Jean-Baptiste Élissalde, passé par le Stade Toulousain comme joueur (2002 à 2010) puis entraîneur (2010 à 2017). Il a du gaz, il s'engage plein badin. Sur chaque prise de balle, il joue à 100 %. Il aime jouer les duels. Il a de bonnes courses en rupture, ce qui prouve qu'il maîtrise les timings. » En espérant que ses vaisseaux sanguins le laissent tranquille une bonne fois pour toutes et lui permettent de s'exprimer à cent pour cent.