« Birk » au pied, t-shirt noir, bermuda cotonneux. Cette fin du mois d’août a encore des airs de vacances pour Facundo Isa, arrivé dix jours plus tôt à Pau et interviewé - fait assez rare - sans sa nouvelle dotation verte à dominante blanche parant joueurs et staff de la Section Paloise. L’Argentin a débarqué sur le tard, mais s’est très vite fait au centre Macron fréquenté pour la dernière année, avant de rallier leur future base-arrière du Honhacamp.
D’ici-là, « Facu » aspire à répondre aux attentes d’un mercato très calme mais particulièrement ciblé, pour mieux injecter une surdose de valeur ajoutée. « Je sais que je peux être une pièce clé pour l’équipe, estime à ce titre le joueur de 31 ans. Sur le terrain comme en dehors. »
L’antithèse du « rigolo, solaire comme tout bon Argentin », tel qu’il se dépeint, se concentre peut-être dans cette « grinta » qu’il revendique en match. « J’espère qu’avec Julian Montoya, on va pouvoir amener ça, et qu’elle sera contagieuse. » Percutant à tous les niveaux, le joueur formé au Santiago Lawn Tennis Club se dit « excité à l’idée de sortir de [sa] zone de confort ». Pour mieux exporter son style de gros-porteur sous d’autres couleurs. « Il faut que je mette l’équipe dans l’avancer, faire jouer nos trois-quarts qui vont très vite. C’est ce qu’attend le coach de moi. »
Le nouveau perforateur
Dans le même profil, il y a un an, Pau ne disposait que du seul Beka Gorgadze. Aujourd’hui, il compte trois numéros 8 évoluant dans ce registre de puissance qui a tant fait défaut aux Palois. « Nous sommes trois joueurs au profil similaire, même si Beka (Gorgadze) et moi pouvons jouer n°7 au contraire de Carwyn (Tuipulotu). » Le trio perforateur de la troisième ligne paloise alimente en tout cas un secteur de jeu richement doté. « J’espère qu’on posera de bons problèmes au coach », estime Isa, qui sait combien son pedigree fait de lui un (théorique) titulaire en puissance. « Par rapport à ce statut, je ne me prends pas la tête, ni avec mes coéquipiers, ni avec personne. Et puis je pense être un mec abordable. »
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Un type facile à l’adaptation facilitée par l’arrivée conjointe de son vieux compère et repère argentin Julian Montoya, qu’il accueillera après le Rugby Championship. « Quand on a discuté, avec Seb, il m’avait lâché : « Il y a un autre argentin qui va venir ». Mais je ne savais pas qui c’était. Je n’ai appris que Julian avait signé une fois mon accord donné à la Section. » Et que de facto, le destin continuerait à lier la paire argentine. « On est tous les deux de 1993, et on a tout fait ensemble. Nous avons commencé ensemble, en 2012, par la préparation pour la Coupe du monde U20 en Afrique du Sud. On a ensuite enchaîné avec la Coupe du monde 2013, en France et toujours en U20. C’est l’année où j’ai signé à Toulon, puis je suis reparti en Argentine pour jouer la Coupe du monde. Pampas, Jaguares, Pumas… On a tout vécu tous les deux avec Julian. »
La fracture
Même si Isa s’est sans doute senti bien seul au cours de cette période sombre, s’étirant entre la fin de sa dernière Coupe du monde, et l’épilogue de son passage sur la Rade qu’il a deviné plus qu’i ne lui fut annoncé. « J’avais pas mal de choses à gérer sur le plan personnel. J’arrivais à un moment de ma carrière où cela faisait plus de 10 ans que j’étais dans le monde pro, sans m’arrêter. Avec les Pumas, mon année avait été trop chargée. Et je ne trouvais ni la stabilité mentale, ni la stabilité physique. C’était de plus en plus dur d’être à 100 %. Je voulais mettre un peu le pied sur le frein. Parler de mes problèmes, mes pensées, m’a beaucoup aidé. Cela a fait la « diff » l’année dernière et m’a permis de renouer avec mon niveau. »
À peine le temps de se remettre en selle, que l’arrivée de Mercer a tout chamboulé. « La fin de l’histoire a été un peu bizarre, rembobine amèrement le Gaucho. J’avais confiance en Pierre Mignoni mais ça a commencé à beaucoup parler au sujet du recrutement. Et avec le nombre de non-Jiffs, tu commences à compter, puis Mercer a été annoncé et ils ont décidé de ne pas me prolonger en début d’année. »
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La fin d’une aventure de neuf saisons (2013-14 ; 2017-25), où de l’amertume s’est rajoutée à l’amertume. « Jouer des matchs importants, comme ces deux demi-finales de Top 14 et de Champions Cup, c’était mon rêve depuis le début. Mais il me manque un truc. Je n’ai pas de regret, mais j’ai toujours ce sentiment d’inachevé. » De quoi nourrir la faim de titres de Facundo Isa pour les deux années au cours desquelles l’Argentin sera lié au club palois. « Écrire l’histoire ? C’est le genre de Challenge que j’adore. »