EXCLUSIF – Arthur Iturria : « J’aurais aimé avoir une petite discussion avec le staff du XV de France »
Arthur Iturria revient sans détour pour Actu Rugby sur sa Coupe du monde en demi-teinte, sur son replacement de 2e ligne non prévu, et ses soucis physiques qui l'ont affecté.
Publié le 7 Nov 19 à 12:17
Arthur Iturria s'est confié en exclusivité pour Actu Rugby. Le 3e ligne du XV de France n'a pas fait dans la langue de bois.
Arthur Iturria s’est confié en exclusivité pour Actu Rugby. Le 3e ligne du XV de France n’a pas fait dans la langue de bois.
Quelques jours après son retour du Japon, Arthur Iturria s’est confié en exclusivité à Actu Rugby. Sans filtre, le troisième ligne clermontois a évoqué ses soucis physiques qui l’ont empêché d’être à 100 % au Japon, ou l’absence de discussion avec le staff du XV de France. Il comprend aussi le geste de Sébastien Vahaamahina, son coéquipier de club.
Actu Rugby : Comment allez-vous après une telle compétition ?
Arthur ITURRIA : « Les vacances ont fait du bien, je me suis reposé. Il me reste à finir de renforcer ma jambe gauche. J’ai du mal à me remettre de ma déchirure aux ischio-jambiers, et comme j’avais aussi des problèmes de dos qui ont entraîné une sciatique, j’ai du coup perdu de la force dans ma jambe gauche. Je suis en renforcement en ce moment et je serais prêt à revenir à fond d’ici deux ou trois semaines. »
Commençons par l’actualité : Morgan Parra a des envies d’ailleurs et le club lui a donné son bon de sortie. En avez-vous parlé avec lui, le comprenez-vous ?
A.I. : « J’aime beaucoup Morgan, je joue avec lui depuis sept ans. S’il a envie d’aller voir ailleurs, il fait ce qu’il veut et il a raison de le faire. Maintenant, est-ce qu’il va partir ou pas, je n’en sais rien. Je vous avoue, et je suis comme ça, que ça ne m’intéresse pas trop l’actualité. »
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Perdre un historique et un cadre de l’équipe comme lui, ça serait douloureux pour le groupe…
A.I. : « En effet, c’est LE cadre de notre équipe. Il y en a d’autres, mais Morgan, c’est celui qui a tout connu avec Clermont. Si on le perd, ça sera préjudiciable pour nous, mais il faudra faire avec, le club ne va pas s’arrêter de tourner. J’avoue préférer qu’il reste avec nous, car c’est un mec important sur le terrain, mais surtout en dehors. »
C’est devenu pénible parce que je sentais bien que je n’étais pas au niveau où je voulais être et où on m’attendait aussi.
Vous êtes dans ce club depuis 2012, vous aussi vous aimeriez dans le futur aller voir ailleurs, connaître autre chose ?
A.I. : « Je ne sais pas de quoi sera fait demain et je ne peux pas dire un non définitif. Si je dois faire autre chose, ça sera plus pour me rapprocher de chez moi où j’ai joué avant. Je ne me vois pas faire 36 clubs, je suis plutôt dans la vision de ne jouer que pour un seul club à ce niveau, en tout cas, je préférerai. »
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Après la Coupe du monde, on vous a vite vu du côté de Morlaàs, votre club formateur. Était-ce important de revenir aux sources ?
A.I. : « J’étais de passage à Pau et on m’a proposé de venir passer mon dimanche à Morlaàs. Je n’ai pas hésité et c’était super sympa de passer du temps avec des gens qui m’ont vu grandir. J’y ai joué de 9 à 14 ans, c’était une belle partie de mon enfance. »
À peine rentré de la coupe du monde au Japon, Arthur Iturria est venu donner le coup d'envoi et a passé tout son dimanche avec ses anciens coéquipiers de l'Union Sportive Morlaàs Rugby qui jouait contre Amicale Joueurs Lombez Samatan en Fédérale 2.
À peine rentré de la Coupe du monde au Japon, Arthur Iturria est venu donner le coup d’envoi du match Morlaàs – Lombez-Samatan en Fédérale 2. (©US Morlaàs)
À titre personnel, comment avez-vous vécu cette Coupe du monde ?
A.I. : « Je ne l’ai pas très bien vécue… Sportivement et physiquement, ça a été compliqué à cause de ma blessure de fin de saison. Du coup, j’ai couru un peu après le temps et sur la fin, c’est devenu pénible parce que je sentais bien que je n’étais pas au niveau où je voulais être et où on m’attendait aussi, je pense. Il y a des moments où tu ne peux pas être le meilleur et là il y avait meilleur que moi. Donc, c’est normal que je n’ai pas trop joué sur la fin. »
Comment avez-vous vécu cette élimination en quart de finale de la Coupe du monde ?
A.I. : « Je l’ai vécue de l’extérieur, mais c’est dur, car comme tout le monde le dit, on aurait mérité de gagner. Le groupe a relativement bien joué ce match et c’est dommage de s’arrêter sur ça. Mais ça va nous construire, ce n’est pas une défaite comme les autres même s’il faut arrêter de parler de « défaite encourageante ». Il faut aussi arrêter de se dire qu’on aurait pu être champions du monde ! Il y a des caps à passer, je pense qu’on en a passé un, même si on a pas été aussi loin que d’habitude, et c’est une bonne chose pour le futur. »
Physiquement je n’étais pas à apte à jouer deuxième ligne ni troisième ligne sur cette Coupe du monde.
Vous avez évolué en deuxième ligne, on ne vous a pas senti forcément à l’aise à ce poste. Le confirmez-vous ?
A.I. : « Jouer en deuxième ligne n’a pas du tout été évoqué pendant la préparation, c’est quelque chose que j’ai vu venir… Quand on te met en deuxième ligne pendant les matches amicaux, ça veut dire des choses. J’aurais aimé avoir une petite discussion avec le staff un peu avant, mais je ne l’ai pas mal pris, car ils m’ont fait confiance sur le premier match, c’était important. En aucun cas j’ai râlé de jouer à ce poste, le soucis, c’est que physiquement je n’étais pas à apte à jouer deuxième ligne ni troisième ligne sur cette Coupe du monde. »
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Avez-vous compris la volonté du staff de vous voir à ce poste ?
A.I. : « Je vous avoue ne pas avoir eu de discussion avec le staff… Pour lui, je pouvais jouer deuxième ligne donc voilà. Je ne sais pas pourquoi il a eu cette volonté, je n’en ai aucune idée… »
Aimeriez-vous vraiment qu’on vous considère comme un troisième ligne à part entière ?
A.I. : « je sais qu’à Clermont je vais jouer troisième ligne, là-bas, on me considère comme ça. Si l’équipe de France veut un deuxième ligne et que je ne joue que troisième ligne dans mon club, eh bien ils iront prendre un autre joueur… Ça sera comme ça. »
Même si vous n’étiez pas au mieux de votre forme, comment avez-vous vécu le fait de passer de titulaire indiscutable en Bleu lors du dernier Tournoi des 6 nations à en tribunes pour le quart de finale du Mondial face au Gallois ?
A.I. : « J’avoue que c’est mieux passé que si j’étais en grande forme. Ce n’est pas du tout une excuse, mais ça passe mieux comme ça. Mais je sais aussi qu’il faut que je progresse sur certains points, car il y a beaucoup de concurrence. C’est pas toujours tout beau, tout rose, tu n’es pas toujours le meilleur, donc c’est aussi une bonne chose d’aller en tribune regarder les autres jouer et de se dire qu’on n’est pas un titulaire indiscutable, c’est important. »
Sébastien ? Je ne lui en veux pas du tout. […] Il est pour moi le meilleur joueur que l’on ait en France devant.
En voulez-vous à votre coéquipier Sébastien Vahaamahina, exclu pour ce coup de coude ?
A.I. : « Pas du tout. Je le connais très bien, je ne lui en veux pas du tout, je ne suis pas comme ça. »
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Comprenez-vous que l’on puisse disjoncter de la sorte dans un quart de finale de Coupe du monde ?
A.I. : « Je le comprends, surtout que c’est un joueur qui est très agressif sur le terrain, qui fait beaucoup de choses dans l’ombre et ça, les gens ont du mal à comprendre et jugent un peu vite, mais il est pour moi le meilleur joueur que l’on ait en France devant. C’est dommage qu’il ait eu ce geste, mais pour tout ce qu’il a fait et tout ce qu’il va faire… C’est pas un joueur qui va percer sur tous les matches, mais sans lui, je ne suis pas sûr qu’on aurait aussi bien joué en première mi-temps ! »
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Un temps indiscutable en équipe de France, Arthur Iturria sera en tribunes pour le quart de finale face au pays de Galles.
Un temps indiscutable en équipe de France, Arthur Iturria était en tribunes pour le quart de finale face au pays de Galles. (©Icon Sport)
Pour vous, faut-il qu’il revienne en équipe de France ?
A.I. : « je ne pense pas qu’il revienne sur sa décision le connaissant. C’est quelqu’un qui est droit dans ses baskets et quand il dit quelque chose, il tient sa parole. Je ne suis personne pour lui dire de revenir, il fait ce qu’il veut, comme je le disais pour Morgan. Ça fait longtemps qu’il a décidé ça, malgré tout ce que l’on dit et maintenant, il va se concentrer sur ce qu’il veut et je pense que ça lui sera bénéfique. »
Même s’il y a du positif, on ne peut pas aller jusqu’à dire que notre Coupe du monde est une réussite.
Estimez-vous que la Coupe du monde du XV de France est une réussite ?
A.I. : « On ne peut pas dire qu’elle soit réussie… Je pense que notre plus gros match est le dernier et je pense que c’est une bonne chose de sortir là-dessus. Mais même s’il y a du positif, on ne peut pas aller jusqu’à dire que c’est une réussite. »
Il doit y avoir d’autant plus de regrets quand on voit ce que nous ont proposé le pays de Galles et l’Afrique du Sud en demi-finale…
A.I. : « J’avoue ne pas avoir regardé ce match, j’ai coupé un peu, profité des vacances et j’ai regardé la finale. »
L’Afrique du Sud fait-elle un beau vainqueur ?
A.I. : « On stigmatise cette équipe en la réduisant à son jeu physique, mais je la trouve pragmatique, elle ne fait pas de fautes. Ils ont certes un gros pack, mais ils ont fait un très bon match de rugby. Quand il a fallu marquer des essais, ils l’ont fait et ils ont vraiment bien maîtrisé leur sujet. »
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La Coupe du monde 2023, est-ce l’objectif que vous vous êtes fixé ?
A.I. : « Avant ça, je me suis fixé comme objectif de revenir physiquement, de reprendre du plaisir sur le terrain, car les trois ou quatre derniers mois, ce n’était vraiment pas ça. Pour ce qui est de la Coupe du monde 2023, à la maison, ça peut être quelque chose de grandiose qui n’arrive qu’une seule fois dans une vie. Je ferais en sorte d’y aller, mais les saisons sont longues et il y en a quelques-unes avant d’y arriver, donc il faut le garder dans un coin de la tête pour le moment. »
Pas con le mec, et on comprend mieux sa baisse de régime