Posté 22 septembre 2014 - 15:47
Son équipe a beau avoir étrillé Brive en terre corrézienne (13-53), l'insatisfaction se lit sur son visage. "J'ai mal joué", lâche-t-il, lapidaire.
Il est près de minuit dans les vestiaires sur stade Amédée-Domenech et Matt Giteau vient tout juste d'en finir avec le contrôle antidopage quand on l'interroge sur l'écrasant succès du RC Toulon. "Oui, j'ai mal joué ; c'est mon sentiment profond, un point, c'est tout, répète toujours aussi froidement Matt Giteau, la tête à moitié enfouie sous la capuche de sa veste de survet'. Je suis content de cette victoire acquise avec le point de BONUS offensif. Mais personnellement, il y a des secteurs où je dois encore travailler pour continuer à m'améliorer."
Vendredi, l'Australien réintégrait le XV toulonnais après trois semaines sans jouer. Pour le déplacement à Colombes, face au Racing-Métro (17-10), à la fin du mois dernier, Bernard Laporte l'avait laissé au repos comme d'autres cadres (Sébastien Tillous-Borde, Delon et Steffon Armitage...). Ensuite, une vive douleur au niveau des adducteurs l'avait écarté des terrains pour les réceptions de l'Union Bordeaux-Bègles (18-13) et du Stade Français (24-28) à Mayol.
"L'équipe était dans un mauvais jour"
"Je manquais forcément de rythme devant Brive, développe un Giteau pourtant décisif sur au moins deux essais, vendredi (celui de Mitchell et le second de D. Armitage). Cela m'a handicapé dans mon jeu. Dès lors, je ne peux pas être content de ma prestation. Je le pense sincèrement ; je sais que je peux faire nettement mieux. En revanche, je suis heureux du résultat. Cela fait du bien à l'équipe. Celle-ci était animée par un excellent état d'esprit."
À Brive, on fut loin effectivement des deux brouillons rendus coup sur coup au stade Mayol. "L'équipe était dans un mauvais jour, samedi dernier (contre le Stade Français), estime l'ancien Wallaby (92 sélections entre 2002 et 2011) qui avait dû assister à ce match en tribunes. On a su réagir."
Avec un Giteau au poste de demi d'ouverture. "Je prends plaisir à évoluer en '10', apprécie l'intéressé en esquissant un sourire. Mais bon, je serais tout aussi content si je jouais en '12', en '15' ou en '9'... Euh non, pas en '9' quand même ! En fait, je suis heureux lorsque je joue."
"Je serai très vieux à la fin de mon contrat !"
Heureux, Matt Giteau l'est à Toulon tout court. Ces dernières semaines, Jacky Lorenzetti, le puissant président du Racing-Métro, a bien tenté de le séduire et de le convaincre de rejoindre le club des Hauts-de-Seine, moyennant des émoluments revus à la hausse.
Le natif de Sydney, qui était en fin de contrat au terme de cet exercice, a rempilé au RCT. "Je suis surtout content d'en avoir terminé avec ces discussions et qu'un accord ait pu être trouvé, souligne-t-il, soulagé. Ma priorité était de rester à Toulon ; c'était mon premier choix, de toute façon. Désormais, je peux me concentrer sur le terrain et le jeu."
En prolongeant deux ans avec une troisième saison en option, Giteau, qui fêtera ses 32 ans le 29 septembre, bouclera sans doute sa carrière dans le Var. "Oui, je sais, je serai très vieux à la fin de mon contrat !, se marre-t-il maintenant. En tout cas, c'est une certitude, mon parcours de joueur s'achèvera à Toulon." Dans une ville, une région où sa famille s'épanouit pleinement. "Mes proches adorent vivre ici, confie encore ce papa poule de deux enfants (Levi, 2 ans et demi, et Kai James, 10 mois), marié à Bianca, ancienne joueuse de netball (sport dérivé du basket). Levi a ses habitudes à la crèche de Carqueiranne où nous habitons. Nous nous sentons parfaitement bien dans cet environnement."
"Tous les membres du club et les supporters ne cessent de me soutenir"
Matt Giteau l'est tout autant dans les rangs du RCT, où il a entamé sa quatrième saison, cet été. "Je suis Toulonnais !, s'exclame-t-il comme on lance un cri du coeur. C'est bien simple, je n'imaginais pas jouer ailleurs qu'à Toulon. Je n'ai jamais changé d'avis. D'ailleurs, c'est le discours que j'ai tenu au cours des discussions avec le président Mourad Boudjellal et Bernard Laporte."
Voilà une manière de couper court aux intentions qui lui ont été récemment prêtées, au moment de sa renégociation de contrat et de la cour appuyée du Racing-Métro. "À Toulon, tous les membres du club et les supporters ne cessent de me soutenir, poursuit un Giteau très touché. Je leur suis reconnaissant pour toute l'attention qu'ils me portent, à moi et à toute ma famille. Ça, c'est le plus important. J'ai donc envie de leur dire merci."
La réciproque est vraie, tant l'Australien rayonne au coeur du RCT depuis son arrivée en novembre 2011. Avec la RETRAITE sportive de Jonny Wilkinson, Matt Giteau est même devenu l'élément central du dispositif varois.
"Je suis exigeant envers moi-même, c'est sûr"
"Accomplir parfaitement mon boulot suffit à mon bonheur de joueur, nuance-t-il avec humilité. C'est un tort de me considérer comme le principal leader de l'équipe. Carl (Hayman), qui est notre capitaine, et Chris (Masoe) sont très influents au sein du groupe. Pour ma part, il m'arrive d'intervenir, mais je ne suis pas le seul à le faire. Je veille surtout à être le plus performant possible pour être utile à mes partenaires. Chaque semaine, je m'efforce de l'être. Je mets tout en oeuvre pour réussir encore mieux qu'au match précédent."
Ce raisonnement n'est pas sans rappeler celui que cultive Wilkinson, devenu responsable du jeu au pied et des skills auprès des trois-quarts du RCT. "Je suis exigeant envers moi-même, c'est sûr", reconnaît Matt Giteau dans un sourire empreint de la plus grande détermination.
La rigueur a toujours été le moteur de la réussite. À Toulon, on le sait bien.
LAURENT BLANCHARD