Pour la première fois depuis votre arrivée à Clermont en 2010, vous ne vous occupez plus d'entraîner l'attaque de l'ASM, confiée à Xavier Sadourny. Vous avez aussi engagé un spécialiste de la défense, Benson Stanley. Qu'est-ce qui vous a poussé à réorganiser votre staff cette saison ?
C'est une chose que j'avais évoquée dès le mois de janvier, avant la pandémie de Covid, avec le président Eric de Cromières (décédé en juillet). Je lui avais dit que je pensais qu'il faudrait une évolution dans le staff, parce qu'on perdait en efficacité. Il trouvait que c'était une bonne chose aussi, mais avec le coronavirus, ça n'a pas été facile à mettre en place. La saison dernière, j'ai ressenti non pas une usure, mais un questionnement : est-ce que j'étais efficace dans tout ce que je faisais ? Je me suis rendu compte que les discussions que j'avais avec les joueurs étaient de plus en plus superficielles, entre deux couloirs, que je n'avais pas le temps d'échanger en profondeur. Tu fais tout à la va vite et tu perds de la précision.
Vous aviez besoin de vous éloigner du terrain pour mieux penser au reste ?
J'y suis toujours sur le terrain, tous les jours ! Mais moins dans l'animation des séances, ce qui me permet d'avoir plus de recul et d'être plus dans le détail. Mon nouveau rôle demande aussi du management pour le staff, parce qu'on est une vingtaine maintenant, alors qu'on avait commencé à deux ou trois...
Après une décennie où vous avez peaufiné le plan de jeu de l'ASM, c'est facile de passer la main ?
Il y a un manque, c'est sûr, mais c'est important de déléguer. Il faut retrouver une place, ne pas déborder, garder un bon équilibre pour que tout le monde puisse s'exprimer. Je ne dis pas qu'on est déjà bien, on n'a fait que deux matches, on est aussi en reconstruction dans l'effectif, donc on est encore en pleine évolution. Mais c'était nécessaire pour moi de prendre plus de hauteur, pour aider à la fois les joueurs et le staff, en étant plus dans du management. J'ai voulu être entraîneur pour échanger, transmettre. Je vais pouvoir revenir sur des choses comme ça.
« C'était nécessaire pour moi de prendre plus de hauteur, pour aider à la fois les joueurs et le staff »
Vous souhaitez aussi vous rapprocher du centre de formation ?
C'est difficile en ce moment avec les contraintes du Covid, mais c'est l'objectif. J'ai souvent Adel Fellah (l'entraîneur des Espoirs) au téléphone. Une fois par semaine minimum, je vais voir un entraînement. À terme, on veut travailler plus en profondeur avec le staff, les kinés, les médecins, pour qu'il y ait plus de continuité entre leur travail et nos attentes. On aura le même vocabulaire, les mêmes protocoles dans les soins ou la préparation physique. Ça rendra les choses plus faciles pour que les jeunes s'adaptent. On est dans une réalité économique aussi, au-delà de l'identité culturelle qu'on cherche à avoir. C'est accéléré par les économies qu'on doit maîtriser, le salary cap, les JIFF.
Votre adjoint, Bernard Goutta, perd la prérogative de la défense...
Ça lui donnait énormément de travail. S'occuper de la conquête, du jeu d'avants, la touche, la défense... Tu n'en dors pas ! Je connais Bernard, je sais comment il bosse, il ne veut rien faire à moitié, c'est usant ! Tu ne peux pas lui demander d'être sur ce rythme en permanence. Il fallait partager les tâches
Qu'est-ce qui vous a orienté vers Benson Stanley, qui vient d'arrêter sa carrière de joueur ?
Je l'ai vu évoluer comme joueur chez nous (2012-2017) et, très vite, j'avais vu qu'il avait quelque chose de différent dans la capacité à transmettre. Avant qu'il ne parte à Pau, je lui avais déjà proposé de travailler avec nos jeunes, mais il voulait jouer encore. Il est déjà très autonome mais n'a pas la prétention de tout savoir, il est tout le temps en discussion avec les autres membres du staff. Mais il sait présenter les choses et il a le respect des joueurs.
Xavier Sadourny, lui, était déjà dans le staff mais se contentait d'un rôle technique. Qu'est-ce qui vous a poussé à élargir ses responsabilités ?
Il a été joueur, il a entraîné, il a eu de l'expérience à Lyon, il a entraîné les jeunes, il a beaucoup de vécu sur le terrain. Les jeunes, c'est formateur, tu testes énormément de choses, tu te fais la main. Il avait une bonne connaissance du club et du public, ça l'aide. »