Il y a quelque chose d'étrange à aborder une dernière ligne droite dans un endroit comme Montgesty, petit village du Lot où les routes ne sont qu'une succession de zig et de zag. Mais c'est ici, dans ce lieu où Fabien Galthié a grandi, que le sélectionneur et son staff ont commencé leur aventure sur les cendres du Mondial japonais en novembre 2019.
Et c'est donc là, à quatre mois de la Coupe du monde en France, point d'orgue de leur mandat, qu'ils ont choisi comme un symbole de réunir le presse, hier midi, pour donner les grandes lignes de la préparation estivale qu'ils réservent à leurs joueurs. « On s'est retrouvés en séminaire dimanche après-midi pour deux jours, explique Galthié. Il nous semblait évident de revenir passer un peu de temps à Montgesty. Ici, c'est calme, c'est serein, ce qui nous permet de bien poser notre travail et d'avancer sur la finalisation de notre préparation. »
Première information du jour, l'encadrement tricolore a décidé d'annuler le premier stage de l'été qui était initialement prévu à Carpiagne (Bouches-du-Rhône), du 26 au 28 juin. Trop proche des demi-finales (9 et 10 juin) et de la finale du Top 14 (17 juin). « Au regard de la saison que les joueurs sont en train de réaliser, on a jugé préférable de leur laisser un maximum de récupération mentale et physique avant d'entamer la préparation », observe Galthié. La prépa débutera donc par un stage à Monaco (du 3 au 14 juillet) avant de se poursuivre à Marcoussis (du 24 juillet au 3 août) et de se terminer dans les Landes à Capbreton (du 7 au 25 août).
Trois temps forts qui seront précédés par une mise en bouche à Marcoussis du 5 au 9 juin, juste après les barrages du Top 14. « On réunira un groupe de 23 joueurs qui viendra vivre une semaine de prépa avec les moins de 20 ans, dit le sélectionneur. Ces 23 ne feront évidemment pas partie des demi-finalistes du Top 14, mais devront avoir l'ambition d'entrer dans le vestiaire des 42. Cette première liste est très importante pour nous, parce qu'elle nous préparera à préparer, comme on s'entraîne parfois à entraîner. »
« Chacun d'entre nous pourra donc vivre avec sa famille ce moment de la préparation »
Fabien Galthié, à propos du stage à Capbreton
Les joueurs bénéficieront aussi de deux coupures d'une semaine durant l'été, l'une juste après le stage à Monaco, l'autre juste après le dernier match amical face à l'Australie (27 août). Ils pourront aussi profiter de leur famille durant la période des matches de préparation et du stage à Capbreton du mois d'août dans un contexte inédit. « On a choisi le site de Capbreton-Seignosse parce qu'on voulait faire vivre à nos joueurs et à notre staff une prépa équilibrée dans un cadre différent, confie Galthié. On ne sera pas à l'hôtel, mais dans la nature, dans un village avec pour chaque membre de notre "squad" une maison ou un bungalow à disposition. Chacun d'entre nous pourra donc vivre avec sa famille ce moment de la préparation. »
Le staff des Bleus a décidé de garder sa méthodologie des tournées de juillet et de novembre et du Tournoi. Si une première liste de 42 joueurs sera bien donnée le 21 juin, elle sera réactualisée avant chaque début de stage pour permettre notamment à des joueurs de retour de blessure de réintégrer le groupe. « On sait très bien qu'il y aura des blessures et des joueurs qui reviendront, dit le sélectionneur. Chaque changement de cycle, que ce soit à Monaco, Marcoussis ou Capbreton nous donnera donc l'opportunité de changer éventuellement quelques éléments des 42. Ce sera une préparation sans concession, avec beaucoup de précision. »
Une centaine de joueurs, selon l'encadrement, peuvent encore espérer participer au grand raout de septembre-octobre. « À partir de mardi, nous allons recommencer notre processus de sélection, précise Galthié. On va prendre 100 joueurs environ que nous allons classer de 1 à 6 ou de 1 à 7 par poste, et tous ces joueurs seront informés qu'ils sont en capacité de participer à la Coupe du monde. Jusqu'au dernier match, j'invite d'ailleurs l'élite du rugby français à rester prête à monter dans le bus de l'équipe de France. »
Fabien Galthié a croisé Anthony Jelonch la semaine passée. Le troisième-ligne toulousain, victime d'une rupture du ligament croisé du genou gauche fin février, est actuellement en convalescence et lutte contre le temps pour faire partie des 33 pour la Coupe du monde. Ses temps de passage sont plutôt bons.
« Il pèse 106 kg à l'heure actuelle, s'amuse Galthié. Je l'ai trouvé plus solide que d'habitude, mais ça faisait longtemps que je ne l'avais pas vu. Il suit un programme de rééducation, tout se passe très bien. Mais comme c'est un joueur exceptionnel, il a une capacité de récupération hors norme. Il est déjà en avance et le chirurgien ne comprend pas ce qui se passe avec lui. Mais Anthony est un cas parmi d'autres. Il y a beaucoup de joueurs blessés qu'on suit. On les accompagne tous. »
« En termes de timing, on peut dire qu'Anthony est vraiment dans les temps, ajoute Bruno Boussagol, le responsable du pôle médical des Bleus. Mais il y a d'autres étapes à passer et c'est difficile de se projeter. On sait qu'en septembre il sera à cinq moins plein. Anthony est pleinement engagé dans sa rééducation et au fond de lui il entretient cet espoir, ce qui est très bien. »
Le deuxième-ligne australien du Stade Toulousain Emmanuel Meafou n'est toujours pas sélectionnable pour les Bleus (il ne le sera légalement qu'en novembre prochain, puisque ça fera alors cinq ans qu'il réside à Toulouse), mais comme les règles ont changé alors que le joueur était déjà en France, le staff tricolore espère encore bénéficier d'une dérogation auprès de World Rugby pour pouvoir l'inscrire sur sa liste des 42 et, peut-être, des 33.
« Une procédure a été lancée auprès de World Rugby et on attend une réponse, révèle Galthié. On nous a promis une réponse claire à la mi-juin. On saura si on pourra compter sur Emmanuel Meafou pour la préparation ou s'il faudra attendre novembre 2023. » Au top depuis de nombreux mois, le colosse apporterait une énorme plus-value au pack français. « L'équipe de France n'est pas dépourvue à ce poste, mais c'est comme quand on vous offre un bouquet de fleurs, image le coresponsable de la conquête William Servat : plus il y a de fleurs, plus le bouquet est beau. »