L'oeil d'Olivier Magne: «Joueurs, prenez le destin du rugby en main»
Publié le
mercredi 22 août 2018 à 19:45
Olivier Magne, ancien troisième-ligne de l'équipe de France, consultant de L'Équipe, livre sa vision personnelle de la saison de Top 14 qui s'ouvre samedi.
Olivier Magne est cette saison consultant pour L'Equipe. L'ancien troisième-ligne international français livrera son analyse personnelle chaque semaine de Top 14 et de Coupe d'Europe. À quelques jours de l'ouverture du Top 14, il exhorte les joueurs à prendre la responsabilité du jeu.
« Une nouvelle saison commence et j'avais envie de dresser une liste de voeux. Le premier n'est pas très original mais j'y tiens beaucoup : j'espère voir beaucoup plus d'équipes basculer dans un rugby résolument tourné vers l'attaque, plutôt qu'un jeu d'attente, de contre.
C'est vrai, il y a eu du mieux la saison dernière - les stats en attestent (plus de 5 essais par match) - mais je sens encore de la timidité chez certaines équipes, d'autres qui manquent de spontanéité, de fraîcheur, font preuve d'inconstance lorsqu'elles sont en possession du ballon, certaines encore qui sont rattrapées par l'enjeu et la pression.
C'était particulièrement criant lors de la phase finale, où l'on est carrément resté sur notre faim. Le Top 14 ne peut pas se satisfaire du spectacle entrevu au printemps, ce n'est pas un rugby qui crée une émotion positive chez le public. Oui, les fondamentaux sont importants. Non, la défense n'est pas un gros mot. Mais elle ne doit pas être le moteur des équipes.
Permettre aux Bleus de briller
D'autant que, et j'y vois un lien très fort, ce rugby-là n'est pas celui qui gagne au niveau international. Or se profile la Coupe du monde dans un an. Mon deuxième souhait est donc que les clubs du Top 14 prennent conscience de leur rôle important pour permettre aux Bleus de briller au Mondial. Donner plus de temps de préparation à l'équipe de France, c'est très bien, mais j'aimerais aussi que dirigeants, entraîneurs, joueurs s'engagent dans une vision du rugby correspondant davantage à la vitesse et à la précision technique requises au plus haut niveau.
Enfin, après le choc causé par la mort du jeune Louis Fajfrowski, comment ne pas évoquer la question centrale de la santé des joueurs.
Première chose : il faut ouvrir en grand le débat, ne pas être dans le déni, rassembler, croiser et analyser les informations avec les autres championnats et communiquer l'ensemble des données statistiques disponibles sur les blessures, les commotions, pour faire un diagnostic très clair.
Il est possible d'éviter le contact : faites-le !
Et ensuite, prendre des décisions fortes avant que le rugby ne devienne trop anxiogène. Je lance d'ailleurs un appel aux joueurs : soyez pro-actifs, prenez le destin de votre sport en main. L'évitement doit primer sur l'affrontement. Je n'ai plus envie de voir des joueurs, qui ont du champ et la possibilité de prendre un intervalle, viser délibérément le défenseur.
Évidemment, dans certaines situations, lorsque le jeu est fermé, il n'y a pas d'autres options que le contact mais bien souvent il est possible de l'éviter. Faites le ! On a banalisé - et j'y inclus les médias - le fait de mettre un adversaire sur le cul, de lui faire mal. Je ne me retrouve pas dans cette représentation du rugby que peuvent avoir certains joueurs actuels. Pas tous heureusement. La priorité ne reste-t-elle pas de poser la balle derrière la ligne ?
De la même manière, je leur dis : n'attendez pas que l'arbitre vous sanctionne pour abaisser la ligne de votre plaquage.
Le rugby ne veut plus de drame : il en va de votre responsabilité. »