Pourquoi World Rugby envisage d'interdire les plaquages au-dessus de la poitrine
Publié le lundi 27 août 2018 à 20:00
[1] Alors que le règlement interdit actuellement les plaquages au-dessus de la ligne des épaules, World Rugby envisage de les proscrire au-dessus de la poitrine. Des expérimentations sont en cours tandis que, en Top 14, les arbitres ont été appelés à plus de sévérité.
Ce mardi midi, au stade Arcul de Triumf à Bucarest, des cobayes samoans et des souris de laboratoire hongkongaises vont s'affronter sous l'oeil du microscope de World Rugby. Dans ses réflexions autour de la sécurité du jeu, la Fédération internationale a choisi le Trophée - 20 ans - Coupe du monde des équipes de Deuxième Division organisée en Roumanie (28 août-9 septembre) - pour tester pour la première fois l'interdiction de plaquer au-dessus de ce que les Anglophones nomment la «nipple lane», la ligne des tétons.
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[2] Ce serait déjà un progrès dans le lourd contexte qui entoure le rugby en ce moment. Deux semaines et demie après le drame, on ne connaît pas encore les causes exactes de la mort de Louis Fajfrowski, le jeune joueur d'Aurillac. Dans l'attente des analyses complémentaires, on doit aujourd'hui s'en tenir à ce qu'on sait : un jeune homme de vingt et un ans a perdu la vie après un plaquage au niveau du thorax, décrit par tous les témoins directs comme réglementaire. Peut-être que dans quelque temps, le législateur proscrira cette hauteur de plaquage. Peut-être que c'est là le sens de l'histoire.
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[3] D'après les premiers bilans datas, relayés par le média irlandais
The 42, ce dispositif aurait réduit de 50 % le taux de commotions au cours de ce tournoi. La phase 3 commence donc ce mardi en Roumanie.
Le sélectionneur des All Blacks Steve Hansen approuve l'idée : «Je pense que c'est bien parce que c'est plus clair que la "ligne des épaules". On sait tous où se trouvent les tétons. Est-ce que ça va résoudre les problèmes ? Il y aura toujours des commotions parce que deux ou trois gars ne mettront pas la tête à la bonne place.»[...]
[4] Après leur avoir de plus en plus demandé ces dernières années de bloquer l'adversaire en haut, au ballon, les entraîneurs vont-ils bientôt devoir les astreindre à ne surtout pas faire ça ? C'est ce qui se passe déjà à Clermont et ailleurs. «Ça fait quatre ou cinq ans qu'on fait des exercices à l'entraînement avec un élastique au-dessous duquel il faut passer avant de plaquer, indique Laurent Travers, entraîneur au Racing. On s'en sert aussi pour travailler les déblayages. Si un jour on décide de dire qu'il faut plaquer en dessous des hanches, ça ne me poserait pas problème. Ça pourrait mettre encore plus de vitesse dans le jeu puisqu'on ne pourrait pas bloquer les ballons en haut. Toute réflexion est bonne à condition de ne pas dénaturer notre sport. On a tous déjà agi pour régler ce problème. Ne noircissons pas les choses. À un moment, on voulait supprimer les mêlées parce qu'il y avait trop d'accidents. Aujourd'hui, les règles ont changé et ça n'a pas tué la mêlée, qui reste importante. On n'a pas eu besoin d'interdire les mêlées.»
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[5] Le camp des sceptiques existe. Certains pensent que cette initiative ne change pas grand-chose. «C'est déplacer le problème, dit le neurochirurgien Jean Chazal. Il y aura toujours des organes vitaux soumis au risque de traumatisme.» D'autres craignent qu'abaisser la limite de plaquage engendre une recrudescence des commotions provoquées par des chocs tête-genou ou tête-hanche. Faux, rétorque World Rugby, qui assure que sur mille plaquages où les deux têtes sont proches, 11,7 commotions ont été constatées quand, sur le même nombre de plaquages où tête et hanche se côtoient, leurs analyses n'ont détecté que deux commotions. Quand on lui a parlé de ça, Kevin Gourdon a avoué sa surprise. «Parce que dans les souvenirs de chocs violents, j'en ai davantage liés à un genou ou une hanche», précisait le Rochelais.
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1/ Même si l'on parle de laboratoire, je reste très étonnée des termes choisis, au minimum irrespectueux pour les joueurs participant à ce protocole.
2/ Non seulement il est primordial de s'inquiéter des chocs violents à la tête et aux cervicales, c'est bien aussi de s'inquiéter des enfoncements du sternum... Et d'interdire les charges des quinze tonnes "coude en avant".
3/ Il a un cerveau, Steve Hansen ? Il ne sait pas déterminer "la ligne des épaules" (visible aux yeux de tous) alors qu'il "croit" savoir mordicus où se situe "la ligne des tétons" (cachée sous le maillot) ? Cette estimation sera pour le moins arbitraire selon les uns et les autres...
Quant à ceux qui sont bas de poitrine... 
4/ Le coup de l'élastique pour visualiser concrètement une ligne à ne pas franchir lors d'un plaquage est une bonne idée pour créer des automatismes.
Le travail global des staffs effectué sur les mêlées a porté aussi ses fruits, car les mauvaises positions de la tête ainsi que les engagements à contre-temps sont toujours dangereux pour les cervicales, il faut aussi préserver les joueurs des atteintes possibles à la moelle épinière.
5/ Le Professeur Chazal apporte d'ailleurs une explication simple et logique aux accidents gravissimes ou mortels que l'on connaît aujourd'hui : "Je vais vous parler d’un temps que les moins de 20 ans… comme dit la chanson. Avant, il y avait deux groupes : les avants et les arrières, qui se rencontraient peu sur le terrain. Il y avait peu de collisions entre joueurs de calibres très éloignés. Aujourd’hui, quand Michalak est obligé de stopper Nadolo, cela pose un problème de santé."
Et effectivement, comme dit plus loin dans l'article, et ce malgré les statistiques avancées par World Rugby, abaisser les plaquages amènera d'autres chocs plus ou moins violents comme on en a d'ailleurs déjà été parfois témoins, tête/tempe contre genou ou hanche, ces blessures-là seront-elles moins graves ?
Reste qu'il existe une prise de conscience un peu plus aiguë qu'à l'ordinaire, cependant les résultats du travail aux entraînements sur les chocs doivent être concrétisés sur le terrain par un arbitrage plus sévère qui doit laisser sa frilosité dans les vestiaires, quelles que soient les équipes sur le pré, nationales ou internationales, et stop surtout aux capes d'immunité de certains joueurs !