Il y a un an, Christophe Urios était nommé entraîneur en chef de l'ASM Clermont. Jusqu'à jeudi, nous consacrons une série autour de ce premier anniversaire. Deuxième volet, ce mercredi, autour de la lumière que le coach attire à lui tout seul
Suite de notre série ce jeudi :
L’ampleur du chantier, ses frustrations, son effectif mais aussi sa découverte de l’Auvergne et ses produits... Christophe Urios reviendra dans l’épisode 3, ce jeudi, sur ses douze premiers mois à l’ASM.
C’est un constat révélateur de ce qu’est aujourd’hui l’ASM Clermont ; qui mieux et plus que Christophe Urios, arrivé pourtant il n’y a que douze mois, incarne un club qui a plongé au fil des dernières saisons dans une sorte d’anonymat, faute de figures éclairantes, sur ou au bord du terrain ?
A chaque époque de son histoire, l’ASM a été portée par la notoriété de joueurs phares. Voire emblématiques pour les périodes les plus glorieuses. Récemment, ils sont nombreux à avoir été des porte-étendards, d’Aurélien Rougerie à Morgan Parra, des leaders incontestés et incontestables. Avant eux, les Jean-Pierre Romeu, Philippe Saint-André, Olivier Merle ou encore Jean-Marc Lhermet, dégageaient un leadership légitimé par leur place dans la hiérarchie du rugby français.
Ils incarnaient le club par leur tempérament autant que leur talent. Et ils faisaient parler de Clermont (ou de Montferrand) au-delà des frontières du territoire auvergnat. L’ASM a toujours, ou presque, été un vivier d’internationaux français. En perdant à l’intersaison Damian Penaud, Clermont a vu filer sous d’autres cieux sa dernière étoile brillante. Sans oublier le départ dans le même temps d’Arthur Iturria, dernier capitaine de l’ère (brève) de Jono Gibbes.
Il y a un an, Urios pour remplacer Gibbes, un choix détonnant
Alors que le club s’enfonçait dans le classement du Top 14 et dans le marasme, il y a un an, les dirigeants provoquaient un électrochoc en écartant l’entraîneur en chef et en faisant appel au truculent Christophe Urios. Un choix détonnant pour un club aussi discret. Un choix sans garantie sportive, car cela n’existe nulle part, mais un choix payant pour ramener de la lumière sur le club clermontois.
Aujourd’hui, parler de l’ASM, c’est instantanément penser à Christophe Urios. Ce manager averti qui a réussi à Oyonnax, à Castres, un peu moins à Bordeaux où une petite poignée de joueurs lui n’en ont pas laissé le temps. Dès son arrivée, l’intérêt médiatique pour Clermont est monté d’un cran.
En février 2023, pour le match face à Toulon au Michelin, alors que les deux clubs traversent plus le désert qu’ils n’occupent le devant de la scène, le diffuseur du Top 14, par la voix d’Éric Bayle (monsieur rugby sur Canal +), expliquait ainsi la programmation en prime time de cet ASM-RCT.
« C’est une affiche incontournable parce qu’il y a aussi des coachs majeurs et que l’intérêt pour Clermont est grandement renforcé par l’arrivée de Christophe Urios. »
Il y a un mois, Canal a diffusé un documentaire de près d’une heure sur l’ASM ; le seul du Top 14 à avoir eu ce privilège. « Au cœur du volcan » s’est avéré un énorme coup de projecteur sur Christophe Urios et son management. Bien plus qu’une immersion dans les entrailles du club. Un signe supplémentaire de ce qu’est l’ASM aujourd’hui ; un entraîneur qui attire la lumière… quitte à faire de l’ombre, à son corps défendant, à l’institution qui souffre de l’absence de têtes de gondole.
L’intéressé feint d’ignorer cette situation. « Moi, je ne me considère pas comme une tête de gondole de l’ASM. Je suis le coach. Je suis arrivé avec une mission précise et je me considère en mission. Après, je le vis parfaitement, je le gère bien ».
Par son action au quotidien, mais aussi son ouverture sur l’environnement du club, son implication sur le territoire et ses supporters, sans oublier sa faconde et son franc-parler, Christophe Urios contribue aujourd’hui un peu plus à la notoriété du club que les performances de son équipe.
Quant à son omniprésence sous les feux de la rampe sur la durée, le manager clermontois est sur la même longueur d’onde que son président (voir ci-dessous). « Je fais partie d’un staff, d’un club qui génère de la passion d’une région et je suis une des personnes qui participent à ça. Je ne me considère pas du tout comme celui qui va tout changer. Moi seul, ça ne marchera pas. Par contre, je prends mes responsabilités, ce que j’ai toujours fait, partout où je suis passé. Et c’est ça qui me plaît, qui m’excite aussi. Aujourd’hui, c’est très dur. Ça n’avance pas comme je voudrais… Mais on va y arriver » sourit, l’œil pétillant, ce coach qui ne laisse jamais indifférent son auditoire.
Christophe Buron
Jean-Claude Pats (président) :
« Il a les épaules pour gérer »
Partisan d’un discours franc et direct, le président clermontois assume la forte incarnation que dégage aujourd’hui Christophe Urios autour de son club. En précisant qu’elle ne pouvait s’inscrire dans la durée.
Très souvent, les prises de parole de Christophe Urios sont cash. Comment réagissez-vous à sa communication??
« Christophe est très engagé dans ses responsabilités, il ne fuit rien, assume pleinement tout ce qui se passe. Il ne se cache pas, y compris avec vous (ndlr : les médias). Je ne pense pas qu’aujourd’hui la marque de fabrique de l’ASM soit la langue de bois. Je suis donc très à l’aise avec cela et je l’encourage, parce que la langue de bois n’a pas lieu d’exister. C’est une marque de respect vis-à-vis de nos supporters, de nos partenaires et ça nous permet d’assumer ce que l’on est, en bien et en moins bien. »
Vous acceptez donc que votre coach soit médiatiquement en première ligne et qu’il incarne ainsi de manière très forte le club??
« Dans cette phase de reconstruction du club, forcément les projecteurs sont très centrés sur Christophe. Il a les épaules pour le gérer et bien le gérer. Bon, dans la durée, ce n’est pas bon et ce n’est pas sain. Ce n’est pas sain pour lui, pour le club et on en a tous conscience, lui le premier. »
Cette omniprésence induit-elle un manque de véritables leaders sur le terrain??
« C’est un sujet dont on entend régulièrement parler. Là aussi sans langue de bois, je peux dire que par rapport à une certaine époque on n’a pas les leaders emblématiques qu’il y avait alors dans l’effectif. Leader, ça ne se décrète pas, ça ne s’achète pas. Ce sont des joueurs qui se développent, grandissent. Et donc oui, dans ce domaine aussi, nous sommes en bas de cycle. Aujourd’hui, on est en déficit mais je ne fais pas le lien automatique entre ce que fait ou ne devrait pas faire Christophe et cette situation. Pour moi, le leader, c’est le joueur sur le terrain qui tient un rôle clé dans les 20 ou 5 dernières minutes. L’entraîneur, il est au bord du terrain, pas sur la pelouse. »