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mardi 2 août 2005
par Mouky

David Gabin le 04 avril 2001

Une très bonne saison 99/00 permet àDavid Gabin de s’installer comme le 8 titulaire indiscutable de la mêlée montferrandaise. A chaque ballon sorti de la mêlée, on sait par avance que David progressera d’au moins 3 mètres et que l’équipe adverse devra reculer. Mais le Gab’s n’est pas du genre às’endormir sur ses acquis et ses objectifs pour la nouvelle saison 2000/01 sont de progresser encore, de conserver sa place de titulaire et d’intégrer France A pour le tournoi.

Malheureusement, son jeu ne convient pas aux entraîneurs australiens et il se retrouve vite rétrogradé en équipe Espoirs. C’est dur mais les objectifs sont revus et quitte à jouer en Espoirs, il faut maintenant gagner ce championnat Espoirs. Le match Espoirs "ASM - Strasbourg" arrive, match qui devait avoir lieu au Michelin en lever de rideau mais qui fut finalement joué aux Gravanches pour ne pas abîmer la pelouse du Michelin. Match que David avait le choix de jouer ou non mais qu’il a voulu jouer pour que l’équipe Espoirs tourne de mieux en mieux. Malheureusement, pour couronner le tout, il se blesse au visage ce qui le prive actuellement des terrains et de la coupe de la ligue. Certains se seraient démoralisés mais lui "profite" de cette coupure pour travailler avec acharnement avec Steve et pour s’affûter physiquement, pour être au top à son retour. Une énorme volonté, je vous le garantie :

-  lundi, le groupe de l’ASM fait des courses donc il fait parti du groupe.

-  mardi, tous les joueurs sont au repos sauf lui qui a piscine + vitesse.

-  mercredi, tous les joueurs font des petits ateliers, des petits jeux alors que lui, enchaîne des 100 mètres dans la longueur du terrain sous le regard de Gilles de Revière, le chrono à la main.

-  jeudi, repos

-  vendredi : physique aussi...

Malgré cet emploi du temps très chargé, il accepte cette interview et me reçoit même chez lui. Y a vraiment pas à dire, comme je m’y attendais, ce joueur qui est incontestablement un GRAND MONSIEUR autant sur le terrain qu’en dehors. Peut-être qu’un joueur égalera son niveau de sympathie, mais une chose est sûre, aucun ne pourra le dépasser.
J’espère que cette interview est bien retranscrite, j’ai été très touché par ses propos, j’espère que vous ressentirez autant d’émotion que moi. On tient un GRAND JOUEUR avec un cœur jaune et bleu mais on ne le fait pas jouer... Que faire pour lui ? Le soutenir, lui montrer qu’on pense à lui, c’est déjà bien.

Présentation de David Gabin

Gabin David dit Gab’s
né le 16 Juillet 1975 à Greenville (U.S.A, Caroline du Sud).
1m90 - 105 kg.
Poste : 3éme ligne centre.

Interview de David Gabin

En Août, pendant les stages de préparation, comment imaginais-tu ta saison et quels étaient tes objectifs ?

Je pensais refaire la saison que j’avais fait l’an dernier avec comme objectif de faire le tournoi avec France A. Pendant le stage d’inter-saison, j’ai fait les entraînements comme j’avais fait l’an dernier et j’ai fait tous les matchs amicaux en tant que titulaire. J’ai attaqué par le 1er match de championnat en tant que remplaçant mais je pensais alors que c’était pour me mettre un peu au repos avant le match de Colomiers qui était dur et pour voir un peu les nouveaux. J’étais titulaire à Colomiers ce qui me donnait raison et après Colomiers, je me suis retrouvé 2 ou 3 fois remplaçant avant de me retrouver en espoirs sans avoir d’explications. Malheureusement, ça a duré plus longtemps que prévu. Au bout d’un certain temps, ça m’a agacé un peu donc je suis allé voir les entraîneurs qui voulaient eux aussi me voir et j’ai demandé pourquoi je ne jouais pas et ils m’ont expliqué que c’était dû à mon style de jeu qui ne leur convenait pas : je n’étais pas assez présent au large, je ne me déplaçais pas assez, j’étais un bon joueur au près mais ils cherchaient plus un 3eme ligne centre coureur.

Et tes nouveaux objectifs aujourd’hui ?

J’espère reprendre dans 2 semaines avec l’objectif est d’être champion de France avec les espoirs. Et si au meilleur des cas ça pouvait sourire, attendre "un blessé" pour rentrer avec les grands.

As tu senti un soutien de la part des joueurs ou du public ?

Il est vrai que certains joueurs ne comprenaient pas non plus très bien le fait que je ne joue pas mais ils n’en savaient pas plus. Au niveau du public, j’ai souvent été soutenu mais quand tu rentres chez toi le soir, tu te retrouves tout seul.

La concurrence, qu’en penses-tu ?

A partir du moment ou elle est réalisée de manière saine, ce n’est pas un problème mais malheureusement, cela n’a pas toujours été le cas. Y a des gars qui sont arrivés et qui se sont retrouvés titulaires sans rien prouver. Mais l’avantage de cette concurrence, c’est qu’en cas de blessures, tu as un remplaçant qui est tout de suite au niveau.

Ne penses-tu pas que l’on a perdu certaines valeurs avec la professionnalisation ? Peut-on encore parler d’amour du maillot ?

Non, maintenant les joueurs jouent de moins en moins pour le maillot, ça dépend des propositions des clubs. Si un grand club comme Toulouse arrive en finale et qu’un joueur reçoit l’opportunité de partir en Angleterre où il y a beaucoup plus d’argent, il partira même si son club est au top niveau. Je pense surtout aux joueurs qui sont au haut niveau, les internationaux qui sont très sollicités et qui ont de grosses propositions financiéres.

Maintenant, c’est une utopie d’espérer qu’un joueur puisse passer sa vie dans un même club ?

Ah oui, c’est sûr, on ne le verra plus ou presque plus, ce qui est dommage car c’est un peu ce qui faisait le charme du rugby : les mecs jouaient pour le maillot et mettaient toute leur carrière dans leur club. Maintenant, c’est comme le foot, ça mute tous les ans, les étrangers arrivent et pour les jeunes qui sont en juniors ou cadets et qui rêvent de jouer en équipe fanion comme les jeunes de l’ASM qui veulent jouer au Michelin devant 10000 personnes, ça va être très dur.

Qu’est-ce que tu regrettes le plus de l’amateurisme ?

L’ambiance qui n’est plus la même car on est maintenant obligé d’avoir une hygiène de vie sérieuse à coté du rugby, on peut plus se faire les bouffes après les matchs. Maintenant, les gars font leur match et rentrent chez eux. Et puis le fait de s’entraîner beaucoup plus, avant on s’entraînait 4 fois par semaine ce qui nous permettait de faire qqch à coté. Alors que maintenant, j’ai les entraînements et en plus je suis une formation diplômante en informatique de 10h par semaine et ces 10h sont prises sur nos temps de repos : 4h le mardi et 6h le jeudi.

Justement, cette formation parallèle te semble importante  ?

Ah oui bien sur, parce j’ai déjà eu 3 grosses blessures :

-  une rupture du ligament croisé en junior à cause duquel j’ai été oublié pendant un an et qui m’a fait rater la coupe du monde FIRA.

-  En 98, je me suis claqué la cuisse et même traitement, pendant 1 an je n’ai plus rien fait

-  aujourd’hui avec 7 semaines d’absence

Et puis c’est vrai que le rugby peut aider à travailler mais une fois qu’on est blessé, on est vite oublié et si on a pas de diplôme derrière pour pouvoir bosser... Les carrières de rugbyman sont maintenant beaucoup plus courtes qu’autrefois, un tiers de la vie donc c’est important d’assurer ses arrières pour ne pas se retrouver à la rue. Parce que c’est vrai que tout de suite on est jeune et on gagne de l’argent avec le rugby, on vit notre passion mais ça reste éphémère.

Qu’est-ce que tu penses de l’augmentation du nombre de joueurs étrangers dans le championnat ?

Pour nous joueurs, je trouve que c’est n’importe quoi. Pour le club c’est intéressant car ils vont piocher n’importe ou le joueur qu’ils veulent à l’étranger, il le payent et le joueur vient mais pour nous les joueurs, y a la barrière de la langue, la culture du jeu...

Et le rugby en France dans 10 ans, tu le vois comment ?

Je n’y ai jamais vraiment pensé mais ce sera bizarre, encore plus professionnel que ça ne l’est maintenant, un peu comme le foot. Tu sais, j’ai 25 ans et j’espère jouer encore en 1ere division pendant 5 ans.

Maintenant, la carrière d’un joueur se finit à 30 ans ?

Quand tu vois les entraînements que l’on fait, quand on fait des séances physique et que l’on va chercher dans le rouge, ça tire sur l’organisme... On use plus vite notre corps et on le casse aussi plus vite. On va plus vite, on est plus fort mais les impacts sont aussi de plus en plus rude. Des carrières comme font les 2 Eric à l’ASM, je pense que l’on en verra pratiquement plus bien qu’ils ne soient pas très vieux. Par contre, comme Cécillon, 40 ans, on en verra plus, c’est sur.

Quelle est, selon toi, la meilleure formule pour le championnat ?

Je pense que la formule à 16 clubs avec 2 poules de 8 est un bon moyen de resserrer l’Elite. Car 1 seule poule de 16 ferait faire trop de match et 1 Elite à 12 clubs signifierait que de gros gros clubs vireraient. Et il est primordial de garder les phases finales, ça fait parti du rugby. Déjà qu’il n’y a plus de 3eme mi-temps, si on supprime les phases finales...

Qu’est ce que les coachs australiens t’ont apporté précisément ?

Ils veulent que je change mon jeu mais ce n’est pas évident car j’ai toujours joué comme l’an dernier. C’est vrai qu’au niveau physique je n’ai jamais été au top. Steve connaît super bien son job, et tout ce qu’il nous fait faire, il le fait avec nous : il a 45 ans et quand tu fais la séance avec lui, qu’il est à coté et que toi t’en chies, t’as envie d’arrêter, t’en peux plus et que lui fait la même chose, et bin tu t’accroches parce que tu penses au fait qu’il a 20 ans de plus que toi. Steve nous a donc beaucoup apporté au niveau physique et aussi sur la rigueur. John lui est pas très très bavard, il est compétent dans son domaine mais c’est vrai qu’il intervient pas trop et Tim est le chef qui organise les entraînements, les répétitions à vide avant les matchs.

Et Boffelli à coté ?

C’était un passionné, un fanatique du rugby et puis il était très proche de nous, il avait son caractère aussi mais ça n’avait rien à voir avec aujourd’hui. Déjà il était d’ici et puis c’est vrai qu’il avait des coups de gueules, il était respecté mais c’est différent.

Et comment ça se fait que malgré tout le respect que vous aviez pour lui, la discipline sur le terrain n’était pas irréprochable alors que ce devait être les consignes ?

C’est Steve qui a amené cette discipline : prenons l’exemple d’une séance de courses, imagine que l’on ait à faire un aller-retour matérialisé par des plots et que l’on triche un peu en ne mettant pas exactement notre pied derrière le plot (au cm près). Si lui le voit, tu fais une autre série et si tu râles, tu fais des pompes. Pareil, si tu perds des ballons, tu fais des pompes alors qu’avant, quand on nous le disait, on râlait, on râlait et on essayait de gruger pour ne pas les faire. Aujourd’hui, si on continue à râler, Steve ne s’agace pas et il nous fait des séances encore plus dures.

Que penses tu du fait que les statistiques précises (passes, ballons touchés, perdus, placages...) de tous les joueurs soient maintenant établies après chaque match ? N’est-ce pas un excès de pression ?

Non, sur le terrain, tu ne penses qu’à ton match et tu oublies tout ça. C’est bien pour voir après ce que tu as fait, le nombre de placages, le nombre de passes, de ballons perdus... Mais je ne pense pas que ce soit nécessaire, un 3ème ligne peut être très bon sans toucher beaucoup de ballons. Et un 3ème ligne qui plaque pas, déjà sans faire les stats, tu le vois.

Dans un tel groupe, comment est-ce que l’on vit l’annonce des compos d’équipes ?

Bin c’est dur, très dur... Je me rappelle en début de saison quand on était tous ensemble à la fin de l’entraînement, tout le monde se regroupe et il annonce l’équipe : t’attends avec impatience ton numéro, n°8, merde c’est pas toi alors t’attends les remplaçants et quand t’es pas dans les remplaçants, tu prends un coup de massue, t’es comme un con, t’es obligé de l’accepter et t’attends le WE prochain.

Et les matchs de la 1, tu y assistes ?

Oui quand je peux y aller, j’y vais, je suis pas fâché mais c’est dur de passer du blanc au noir comme ça en une saison. L’an dernier j’étais un des joueurs qui avait le plus joué et cette année, j’ai du faire 4 ou 5 matchs.

Ton avenir tu le vois comment ?

J’en sais rien, je réfléchis, j’ai des contacts mais il me reste encore un an de contrat avec l’ASM. Je veux jouer mais c’est vrai que je suis de la région et que c’est dur de partir mais s’il faut partir, on partira... Quand j’ai dit qu’il ne restait plus que 5 ans, il faut aller les prendre.

Qu’est-ce qui t’énerve le plus dans le rugby ?

Le fait qu’il y ait trop d’étranger. C’est chiant même pour l’équipe de France avec l’exemple au centre. Dans tous les gros clubs, t’as au moins un étranger à ce poste. Et puis c’est chiant pour les jeunes, je me rappelle quand j’étais cadet et que j’allais voir la 1ère avec mon père dans les populaires, j’étais comme un fou et c’était mon rêve de jouer au Michelin. Et maintenant, je me mets à la place des jeunes qui pensent la même choses, ça se ferme de plus en plus. Maintenant, dès qu’un club a besoin d’un mec, ils vont le chercher quelquepart et vont le faire venir avec l’argent...

Comment es-tu venu au rugby ?

J’ai commencé par du foot, j’ai fait 6 mois avec des copains à Riom et puis j’ai connu un autre autre collègue quijouait au rugby qui m’a dit de venir avec lui un mercredi après midi. J’étais un peu plus grand que les autres, ça m’a plu et j’y suis resté. Je suis parti faire sport-étude à Ussel l’année de ma venue à l’ASM.

Ton meilleur souvenir dans le rugby ?

Les Barbarians, le BJ, le sport-étude à Ussel et l’an dernier aussi : il y avait un bon groupe, on a fait les cons contre Pau, on a pas été bons mais je pense qu’on aurait pu faire quelque chose l’an dernier aussi. Malgré les changements d’entraîneurs, au niveau des joueurs on s’est quand même battu pour faire une bonne saison.

Et tes pires souvenirs ?

-  Les blessures, le ligament croisé c’était en juniors juste avant la FIRA

-  Cette année où je suis tombé de très très haut...

Que penses tu des supporters du Michelin ?

La majorité sont bons et connaisseurs mais il y en a une minorité qui sont supporters quand l’ASM gagne. Je me rappelle du match d’Aurillac, ça avait été horrible parce que nous, on était au fond du trou parce qu’il y avait eu beaucoup de changements au niveau de l’équipe, on est rentré au vestiaire à la mi-temps et on ne savait plus quoi faire. On avait déjà été sifflé et quand on est ressorti à la fin du match c’était pareil avec même des insultes. Et ça, des mecs qui insultent les joueurs quand l’ASM perd, j’appelle pas ça des supporters.

Quel message pour les supporters voudrais-tu transmettre aux supporters ?

Le forum, je pourrais dire que c’est bien car maintenant que je connais l’adresse, j’irai voir peu ce qu’il se dit et sinon, qu’il va falloir encore pousser très très fort pour arriver jusqu’au bout pour ramener le bout de bois place de jaude et pour pouvoir le fêter. Ca va être dur mais cette année, je pense qu’il y a l’équipe pour.

Comment tu la sens justement cette équipe ?

Un bon groupe, un gros groupe et je pense qu’au niveau physique, on est au dessus des autres.

Des favoris ?

Stade Français, Montferrand, Toulouse, Castres pour le classement final des poules. Après c’est sur un match, la chance, concentré à 200 %... J’ai des images de l’an dernier, t’arrives en bus vers le stade pour prendre ton sac et rentrer dans le vestiaire, c’est jaune et bleu partout, déjà t’as des frissons... Après quand tu vas voir le terrain, t’es obligé de te calmer, de penser à ton match...

Et la finale en 99, tu étais blessé, comment l’as-tu vécu ?

C’était horrible. En plus quand t’es là comme un con avec ton blaser... On était plusieurs blessés à être venu, on avait fait un tour d’honneur du Stade de France puis après on attend dans la tribune comme des cons avec ton blaser, tu peux rien faire. C’est dur mais bon tu sais très bien que les mecs sur le terrain donnent leur maximum. T’es assis, tu peux rien faire, que penser, écouter, regarder, c’est pas évident... C’est comme ça... Les blessures...

Merci David

Cette interview a été réalisée par Pierre Joly le 04 avril 2001.


Mouky | 2005.08.02 @ 13:30 retour au début de la page


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