#JIFF : Nouvelle mesure votée, explications et conséquences

Lors de l'Assemblée générale de la LNR, qui s'est déroulée hier à Margaux (Gironde), une nouvelle mesure concernant les JIFF a été votée. Celle-ci à pour but de valoriser l'émergence de joueurs français. Mais quelle est-elle ?

Kesseusé un JIFF ?

Au départ, en 2009-2010, les JIFF, Joueurs Issus de la Filière Formation (ou Formation Française), ont été mis en place de manière à limiter le nombre croissant d'étrangers dans les équipes professionnelles et ainsi permettre à des joueurs formés en France, donc en principe des joueurs français, de jouer au plus au niveau pour avoir une équipe de France forte.

Pour être considéré comme JIFF, un joueur doit remplir au minimum une des conditions suivantes :

• avoir passé au moins 3 saisons au sein d'un centre de formation agréé, dans le cadre d'une convention formation ;
• avoir été licencié au moins 5 ans à la FFR au plus tard lors de la saison qui s'achève l'année des 23 ans du joueur.

Le système JIFF limite à deux niveaux le nombre de joueurs non formés en France : dans l'effectif pro et sur la feuille de match. Chaque club ne peut pas avoir plus de 16 joueurs NON-JIFF dans son effectif de référence (en gros l'effectif de référence est constitué des joueurs pro mais sans les joueurs pro formés au club, sans les espoirs, sans les jokers médicaux). Sur la feuille de match, la LNR demandait d'aligner 12 JIFF en moyenne sur la saison (avec un calcul savant) et dorénavant ce sera 14 JIFF (un joker est NON-JIFF sur le feuille, un espoir est JIFF sur la feuille).

Seulement, les clubs ont très vite trouvé les failles du système JIFF et l'ont donc contourné de plusieurs manières pour avoir plus d'étrangers sur le terrain :

1. Le joker pour un espoir : dès qu'un joueur espoir se blessait, même un joueur qui n'avait jamais joué en pro, certains clubs prenaient un bon joueur étranger pour le remplacer, en tant que joker médical. C'était un joueur NON-JIFF de plus autorisé dans l'effectif. Cette astuce a au moins été utilisé par Toulon et Clermont pour Delany, joker médical de Julien Farnoux. Depuis le règlement a changé, on ne peut prendre un joker médical pour un joueur espoir que si ce dernier a déjà figuré sur au moins 10 feuilles de matchs pro au cours de la saison en cours ou au cours de la saison passée.
2. Le joker pour un retraité : des joueurs proches de la retraite et blessés, gardaient une licence dans leur club et était remplacé durant tout une année par un joker médical non jiff de haut niveau. Cette astuce a au moins été utilisée par Toulon avec Craig Burden en joker médical de Sébastien Bruno, 39 ans et blessé une année complète. Plus récemment, saison 2015/2016, La Rochelle a embauché Afa Amosa à la place d'Arnaud Dorier qui avait gardé une licence alors qu'il avait annoncé sa retraite. Cette astuce pourrait être arrêtée si le statut JIFF ou NON-JIFF du joker médical rentrait dans les quota des 16 NON-JIFF autorisés dans l'effectif.
3. L'étranger déjà JIFF : prendre des joueurs étrangers mais qui ont passé leur jeunesse en France, tels les frères Armitage à Toulon. Mais c'est plutôt rare à trouver des joueurs dans ce cas-là.
4. Les FidJIFF, GéorJIFF, étranJIFF : enfin la méthode que tout le monde connait pour faire jouer des joueurs étrangers, c'est de les prendre en contrat espoir, sans que cela grève les quota :
   • vision à court terme : prendre de jeunes joueurs étrangers entre 20 et 22 ans avec un contrat espoir de 1 ou 2 ans pour les faire jouer en Pro. Ils ne n'impactent pas dans les 2 quotas, ils ne pourront jamais devenir JIFF mais ce n'est pas grave, pendant ce temps-là, ils jouent en pro. Cette astuce est massivement utilisée par Montpellier et son contingent de jeunes joueurs sud-africains au physique impressionnant et au talent indéniable : Jacques du Plessis, Pau Willemse, Wiaan Liebenberg, Cameron Wright. Pour 2016/2017, Toulon et le Lou ont aussi récrutés un ou deux joueurs dans cette optique
   • vision à long terme : prendre de jeunes joueurs étrangers, les former au moins 3 ans pour en faire des JIFFs et des joueurs indiscutables en pro. Tous les clubs font ça, on parlera alors de FidJIFF, de GéorJIFF, qui sont des termes pour désigner notamment les joueurs fidjiens et géorgiens qui viennent tôt dans nos clubs pro pour être JIFF ensuite. Les plus célèbres actuellement : Nakaitaci, Yato, Tuisova, Mikautadze, Chilachava...

Nouvelle mesure pour 2017/2018 :

Vous l'aurez compris, si un club veut avoir plus d'étrangers dans son effectif, ce n'est pas les méthodes qui manquent. Au fil des saisons, la règles des JIFF a perdu de son essence initiale, on ne favorise pas la formation des joueurs français, mais on se concentre à contourner le règlement pour avoir le meilleure équipe possible, quitte à ce qu'elle soit largement étrangère.

La LNR décide donc d'ajuster le règlement et de limiter les dérives : à partir de la saison 2017/2018, un joueur étranger recruté sous contrat Espoir ne sera plus assimilé JIFF sur les feuilles de match, et comptera dans les 16 NON-JIFF autorisés, tant qu'il n'aura pas rempli les conditions pour être JIFF. La Limite des 16 NON-JIFF ne se fait plus au niveau de l'effectif pro mais au niveau du club visiblement.

Quelle conséquence aura cette règle :

Au niveau des club du Top 14, qui ont quasiment tous leurs 16 NON JIFF dans leur effectif pro, il n'y aura plus la possibilité d'avoir des joueurs étrangers non jiff de moins de 23 ans sous contrat espoir. Les centres de formation vont alors tous se vider de leurs étrangers Par exemple, au niveau de Montpellier, c'est 3 titulaires qui ne serait plus dans l'effectif. Pour l'ASM, cette saison, il n'y aurait de place que pour 1 NON-JIFF en plus : Yato ? Fernandez ? Raka ?

Edit 16h50 : en y repensant, cette règle est radicale : et le fait que les centres de formation se vident de tous les étrangers est presque inconcevable. Si ça se trouve, cela ne concerne que la feuille de match où les espoirs NON-JIFF seraient comptés comme NON-JIFF, à avoir avec les publications officielles.

Si l'on veut contourner cette règle, il faudra alors faire former ses pépites étrangères pendant 3 ans dans des clubs pro qui n'ont pas encore leurs 16 NON-JIFF, en pro D2 notamment. Ces joueurs deviendraient alors JIFF et pourraient rentrer dans les quotas.

Cela peut marcher si ...

Pour la saison à venir, 2016/2017, le nombre moyen de joueurs JIFF par feuilles de matches a été fixé à 14 (contre 12 la saison dernière).

Les sanctions actuelles si on ne respecte pas les quotas sont :
- au niveau de l'effectif pro : un club ne peut en aucun cas avoir plus de 16 NON-JIFF sinon les licences ne sont pas validées
- au niveau de la feuille de match : si un club n'alignent pas son quota de JIFF, il n'est sanctionné que par un manque à gagner de quelques centaines de milliers d'euros. Pour infos, cette année, tous les clubs de Top 14 respectent ce quota. L'an prochain ce sera beaucoup plus dur mais ce ne sera qu'un manque à gagner financier, ça ne fait pas bien peur.

Paul Goze, Président de la LNR (oui ça fait toujours mal de l'écrire), a annoncé que des mesures seront prises sur cette question. Les clubs qui ne respecteront pas la règle des JIFF pourront être amputés d'un certain nombre de points au classement. Si rien a encore été voté, cette sanction pourrait en faire réfléchir plus d'un dans la course au bouclier.

Une autre règle attendue pourrait être que les jokers médicaux NON-JIFF soient aussi comptés dans le nombre des 16 NON JIFF autorisés.

A terme, les joueurs français auront plus de place pour s'exprimer, pour trouver du temps de jeu et ainsi on verra éclore plus de joueurs avec le niveau pour l'équipe de France.

Cette analyse pourra éventuellement être remise en cause quand les règles et ses innombrables subtilités seront publiées officiellement par la LNR.

Article écrit à 4 mains et 10 doigts : Charly et Mouky

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